Film très solide que ce Jennifer 8, sur lequel les avis que j’avais lu avant de me lancer dans son visionnage étaient assez divergeant. Pourtant c’est une belle réussite.
Coté casting c’est du très bon. Fan de fantastique ma première pensée va bien sur à Lance Henriksen, qui, bien que doté d’un rôle un peu secondaire est toujours très marquant. Il livre une belle prestation, un peu éloigné de ce qu’il peut faire d’habitude, et présente un réel intérêt, doté de surcroit d’un personnage aux répliques bien sentis. En tête d’affiche, c’est pourtant le duo Garcia-Thurman qui doit assuré, et qui assure. Garcia est très juste, investi par son personnage, il reflète bien les sentiments et les émotions de celui-ci, et il confirme de bons talents d’acteur. Pourtant c’est quand même Thurman qui emporte le morceau, livrant une prestation de jeune femme aveugle absolument magistrale. Elle crève l’écran, imposant une présence magnétique lorsqu’elle apparait, et jouant avec une finesse et une justesse mémorable. Pour autant il y a aussi quelques seconds rôles tout à fait réussi, avec des interprètes certes de talent (Malkovitch, Conway…) mais surtout des personnages gratinés !
Le scénario est à la hauteur. Il n’est pas aussi excellent, mais il tient la route. Il maintient un suspens de qualité, un rythme globalement bon malgré quelques petites longueurs, l’enquête est intéressante à suivre, les relations entre les personnages sonnent juste. Je relève simplement une fin un peu vite envoyée, et qui manque de la tension souhaitable à ce moment là. Certes il y a quelques passages pas très originaux, mais l’ensemble tient la route.
La mise en scène de son coté est propre et raffiné. Je ne sais pas pourquoi mais j’ai souvent eu le sentiment d’un réalisateur ayant digéré Kubrick, et s’en rapprochant par des plans extrêmement millimétré et ambigu (la vue dans la cage d’ascenseur confine presque à l’abstraction par exemple). Si Robinson est moins au niveau dans les scènes d’action, pour le reste il se débrouille comme un chef. La photographie a vieilli certes, mais ca lui sied fort bien, du fait de l’atmosphère triste et délabrée du film. Je note des jeux d’éclairages précis et réussis. Les décors sont brillants et surtout brillamment utilisés par le réalisateur. Les paysages sont superbes, l’atmosphère est très plaisante, et cela crée une ambiance particulière vraiment prenante. En revanche l’ambiance musicale manque du même soin, sombrant trop aisément dans la banalité.
Au final Jennifer 8 est un film qui se regarde avec plaisir. Porté par un casting en or massif, par une très belle ambiance, aux limites de l’onirisme, il se ramollit un peu sur son scénario pour pouvoir s’élever jusque dans la sphère des excellents films. Si en effet celui-ci reste bon, il y a tout de même des imperfections sensibles sur quelques lieux communs ou une fin pas très bien ficelée par exemple. C’est vrai aussi que la musique est une déception. Pour autant je conseille vivement ce métrage si l’occasion se présente de le regarder, surtout pour ceux qui aiment les films d’ambiance (un peu au croisement ici de Shutter Island, Insomnia et Shining).