En 1991, Pierre Schoendoerffer filme la Bataille de Dien Bien Phu, qui a vu s'affronter en 1954 l'armée de l'Union Française et les Vietminh du général Giap. A un contre quatre en début de la bataille, les forces en présence au final seront de 1 pour presque 8 à l'avantage des Vietminh et auront réussi pendant 57 jours à tenir tête à leur ennemis. Si Schoendoerffer filme cette bataille de cette guerre oubliée déjà en son temps c'est pour perpétuer le souvenir et la mémoire de ceux tombés dans la "cuvette" de Dien Bien Phu, des soldats oubliés de tous, de leur propre nation qui ont sacrifiés, en connaissance de l'issue tragique, leur vie. Le réalisateur ne prend aucun parti envers l'un ou l'autre des deux camps quoiqu'il choisisse de filmer la bataille du coté français (compréhensible puisque Schoendoerffer était à Dien Bien Phu en 1954 en tant que cinéaste aux armées et qu'il y a été fait prisonnier), l'armée vietminh n'est jamais aperçue, sauf à la fin, sans doute pour montrer (comme dans la 317ème section) que c'est un ennemi invisible qui pilonne sans cesse la "cuvette" avec des mortiers cachés derrières les collines.
Synopsis:
Un reporter Américain se rend en Indochine pour couvrir la grande bataille annoncées à Dien Bien Phu. A Hanoi il rencontre divers personnages à la fois militaires, simples civils, confrères journalistes. Dans cette ville on joue de fortes sommes pour parier ou non sur la victoire d'un des deux camps dans cette bataille qui s'annonce décisive. A Hanoi également se produit un concert de musique classique avec une violoniste française, cousine d'un haut gradé français, auquel toute la haute société d'Indochine assiste comme un dernier adieu...
Avis:
Commençons par les points négatifs:
-L'interprétation est assez inégale. Je n'ai pas du tout apprécié le journaliste américain qui se complait dans un cliché un peu facile.
-le lenteur de certaines scènes et leur inutilité à certains moments. Dommage que Schoendoerffer n'exploite pas plus le personnage du cinéaste des armées envoyé sur la bataille (ce cinéaste c'est Schoendoerffer).
Points positifs:
-la véracité des éléments dispensé au spectateur. Dans ce film TOUT est vrai. Gardez le à l'esprit tout ce qui est dit est vrai ainsi que les personnages évoqués (d'ailleurs les anciens combattants reconnaitront cela au film). Ici Pas d'explosions gigantesques ni d'exploits Hollywoodien avec 4 hommes qui percent des défenses. Non ici la simple vérité que Schoendoerffer à vue et nous livre pour ne pas oublier. Il y a des faits d'armes glorieux d'Hommes solitaires (le chef d'artillerie qui refuse les ordres), des attaques désespérées sur des crètes impossibles à tenir. Et puis des faits beaucoup moins glorieux mais très émouvants: les déserteurs qui se cachent, des officiers qui se suicident, les renforts promis qui n'arrivent jamais, les blessé qu'on ne soigne pas faute de moyens et que penser des hommes que l'état major laisse livrés à leur sort (les ordres par radio à base de "tu te débrouilles personne ne viendra t'aider" c'est assez dur a entendre même pour moi qui suis de l'âge de ceux qui combattaient là bas, je n'ai pas vécu cela mais rien que de l'imaginer ça laisse penseur sur une France qui n'en a strictement rien à faire d'eux. Un mot: Quel Gâchis)
-la qualité cinématographique évidement. Des fois un peu trop classique mais quand Schoendoerffer filme "comme un reporter de guerre" le rendu est exceptionnel et assez immersif.
-les décors, pareil reconstitution très minutieuse, réaliste. Le nombre de soldats représentés renforce le rendu.
-Evidemment la musique de Georges Delerue qui rythme le film. Cette musique qui donne l'un des passage marquant du film avec la superposition du concert à l'opéra de Hanoi et les fusées éclairantes qui s'abattent sur Dien Bien Phu avant l'assaut des Vietminh.
-Enfin preuve que le cinéma peut aussi servir de mémorial: le film à été réalisé avec le concours de l'Armée du Vietnam. Schoendoerffer ne l'oublie pas et gratifie le spectateur à la fin de 1) un bilan humain très lourd des prisonniers français capturés dont les 3/4 mourront dans les camps Vietminh et de 2) la volonté de renouer des lien avec ce Vietnam que les soldats de Dien Bien Phu "aimaient". Le final est grandiose et justifie de le regarder.
En somme malgré des moyens assez modeste, Schoendoerffer grand spécialiste des films sur cette période de décolonisation nous donne un dernier témoignage des soldats de Dien Bien Phu pour ne jamais oublier et renouer une amitié entre les deux pays. Pas de partis pris, pas de politique. Ce qui concerne le réalisateur ce ne sont pas les calculs politiques mais le destins d'Hommes pris en étau et qui avec une force peu commune remontent à chaque fois moins nombreux à l'assaut en chantant la marseillaise. Un film à montrer dans les écoles pour évoquer cette époque peu abordés (ou mal abordés avec de la rancœur). En fait c'est toute la filmographie de Schoendoerffer qu'il faudrait montrer pour parler de la décolonisation (crabe-tambour, section Anderson, l'honneur d'un capitaine, 317ème section,etc) mais cela est un autre sujet.