« Je suis peut-être un affreux réactionnaire mais je trouve cette intimité stupéfiante. La femme légitime séchant les larmes de la favorite, allons ! Non, non et non ! »
D’entrée de jeu, Clouzot place son sens aigu de l’amoralisme et de l’emprise, thèmes récurrents dans son œuvre : un prof parle librement de naturisme tandis que la femme du Directeur de l’école console la maîtresse de son mari. On est en 1954, dans un film tous publics, qui plus est dont l’action se passe dans une école-internat.
En quelques minutes, on apprend qu’un assassinat se prépare
. Ça a du faire beaucoup pour l’époque. Le scénario est la première adaptation d’un roman du couple Boileau/Narcejac, sorti 2 ans plus tôt.
Ainsi, contrairement à son précédent film, Le Salaire de la Peur, Clouzot pose ses personnages en 5 minutes : Paul Meurisse est un Directeur arbitraire, mari toxique, amant violent, Vera Clouzot une Directrice apeurée, fragile, cardiaque, Simone Signoret une professeure autoritaire, une maîtresse battue mais qui a décidé de ne pas se laisser faire, Michel Serrault, dont c’est le premier rôle, un prof effacé, Pierre Larquey un prof réac et obséquieux, auxquels viendra s’ajouter Charles Vanel en commissaire à la retraite aux allures de Colombo avant l’heure.
Revenant à l’expressionnisme de ses débuts, alternant les jeux de lumières plus que les jeux d’ombres, osant l’un ou l’autre clin d’oeil (la rue à Niort est celle qui signait la fin du Corbeau), le réalisateur a parsemé le récit de miroirs qui donnent une impression fugace de vertige. Il n’est pas étonnant que Hitchcock ait salué la remarquable maîtrise de la narration visuelle doublée d’un scénario millimétré. L’histoire raconte que c’est suite à la vision des Diaboliques qu’il débauchera Boileau et Narcejac pour le scénario de son Vertigo (1958). Parmi les particularités du film, notons que la seule musique qui rythme certaines scènes provient des bruits réels, les canalisations ici, la cloche de l’école là.
En quelques films, dont cinq chefs d’oeuvre, Clouzot s’est imposé comme le génie du thriller à la française.