Les Risques du métier est un film qui aborde le thème grave de la fausse dénonciation, de celle qui peut vous mener, innocent que vous êtes, devant le tribunal, et pas pour une petite peine.
C’est du cinéma carré, sans fioriture, assez agréable mais qui, peut-être un peu trop pris par le didactisme de son message, prend des airs documentaires et un poil pédagogiques empesés.
L’interprétation est bonne dans l’ensemble. Quelques lacunes du côté du jeu des jeunes filles, notamment Delphine Desyeux. Nathalie Nell, dans un rôle déjà délicat, impose une présence étrange, monolithique, mais qui colle plutôt bien à son personnage. Reste que c’est difficile de réellement juger son jeu, j’ai du mal à croire que ce ne soit pas Cayatte qui ait demandé une telle interprétation. Enfin… les acteurs adultes eux jouent très bien. Jacques Brel est parfait dans son rôle, tout comme Emmanuelle Riva, remarquable dans le rôle de l’épouse. De bons seconds rôles toujours crédibles et aux personnages réalistes évoluent autour de ce duo, parfois contre, et l’interprétation est un bon point de ce film.
C’est donc plus sur le fond que des lacunes apparaissent. Comme je le disais, si le film de Cayatte se laisse suivre sans déplaisir aucun, porté par une narration peu critiquable et un propos éminemment intéressant, reste que le réalisateur part sur une dimension presque documentaire. Il en résulte un côté démonstratif, un certain manque d’émotion, et il n’y a pas tellement de tension. Finalement on n’a pas tellement peur pour le héros, Cayatte n’arrive pas à faire monter le suspens, l’intensité, et cela car ce qui l’intéresse visiblement avant tout c’est son message. Même si le film est divertissant dans l’ensemble et bien écrit, il n’a pas cette force, cette vigueur que l’on peut ressentir dans d’autres films approchant sur ce genre de situation, à l’instar de La Loi du silence d’Hitchcock. C’est un peu dommage.
Quant à la forme elle est très classique. Mise en scène carrée, sans fioriture, avec pas mal de plans fixes, des gros plans sur les regards, c’est très appliqué mais assez roide. On ressent peut-être là encore la dimension documentaire du film. De la même manière, la photographie sans recherche particulière et les décors convaincants, le film étant tourné dans un petit village, font qu’on a vraiment une impression de réalisme, d’authenticité. Pour le coup je crois que c’était là le meilleur choix, mais cela ne dédouanait pas le réalisateur d’offrir un travail peut-être plus marquant, plus recherché, ne serait-ce que pour accentuer certaine situations dramatiques, à l’instar des troubles d’Hélène Arnaud par exemple. Je n’ai pas grand-chose à dire, sinon, sur la bande son, qui à mon sens n’apporte pas énormément au film, discrète et peu marquante qu’elle est.
Les Risques du métier reste un film attrayant, d’abord car il n’ennuie pas, et ensuite car grâce à deux interprètes principaux à la hauteur et un sujet pertinent, il est évidemment agréable à suivre. Cayatte offre un film carré, et même s’il s’enferme presque plus dans l’essai que dans le film de fiction, ce qui à mon sens livre une œuvre polymorphe pas toujours très aboutie, ça reste du bon cinéma. 3.5