Contrairement aux personnages hauts en couleurs de ses spectacles, Valérie Lemercier livre ici des émotions intimes par des détails infimes. Le fait de jouer une femme plutôt banale dont le spectateur ne connaît pas grand-chose, impose d'adopter un jeu proche de l'esquisse."Dans ce film, on ne peut pas commencer à se cacher, ni chercher la performance, affirme l'actrice. Il faut s'ouvrir et laisser les gens voir un peu plus à l'intérieur."
Dans son livre, dont le film est une adaptation, Emmanuèle Bernheim a essayé de décrire une pulsion primitive entre deux êtres, éloignée de toute idée quelconque d'adultère bourgeois. Il s'agit d'un élan irrépressible, presque animal, et qui est néanmoins quelque chose d'assez pur. Cette aventure d'un soir n'a rien de sentimental, et ce n'en est pas moins une invitation au rêve. D'ailleurs Claire Denis le dit bien : "Je crois que les hommes et les femmes ne passeraient pas souvent à côté d'une rencontre comme celle-ci, même s'ils ne se l'avouent pas toujours, car l'inconnu est auréolé de tout ce qu'on attend. Plus ou moins consiemment, on le désire. Sur lui, on peut greffer toutes ses attentes".
A la parution du livre, Emmanuèle Bernheim a reçu des lettres d'hommes qui se reconnaissaient dans cette histoire, et de femmes qui désiraient connaître ce genre de pulsions ou de désirs qui leur semblait l'apanage des hommes. Mais "pour vivre ce genre de choses, affirme l'auteur, il faut être dans un état brut, ce que la société nous a appris à dominer depuis quand même trop longtemps... Il faudrait enfin se dégager de l'alibi sentimental !"
L'écrivain Emmanuèle Bernheim a commencé à publier ses écrits en 1985. Vendredi soir est son quatrième livre. Le travail d'adaptation de son roman ici mené n'est pas à sa première incursion dans le cinéma. Auparavant, elle a déjà collaboré avec Claire Denis pour Trouble every day, et avec François Ozon pour Sous le sable. En 2002, elle participe en outre à l'écriture de L' Ami(e) de Jeanne de Jacques Fansten.
L'actrice, habituée au registre comique, et donc d'une certaine manière au jeu de masques, appréhendait ici le dévoilement de l'intimité, et plus particulièrement les scènes au lit. Contrairement à ses spectacles où elle se prend en charge en permanence, elle s'est ici laisser guider en toute confiance par Claire Denis, sans préparer ou anticiper sur les événements, afin d'être dans un état de disponibilité et de liberté proche de son personnage.
La musique a été ici composée par Dickon Hinchliffe, le violoniste-guitariste-chanteur des Tindersticks, le groupe ayant déjà composé la musique de deux autres films de Claire Denis : Nénette et Boni et Trouble every day. La bande originale ne vient jamais ici souligner le romanesque, mais elle naît de l'intimité qui se découvre petit à petit entre les deux protagonistes. D'après la réalisatrice, c'est "une musique qui sourd du contact de leur corps".