Anna M. a été présenté en sélection officielle au Festival de Berlin 2007 dans la section Panorama.
Anna M. est un projet qui date de plusieurs années. Charlotte Gainsbourg et Sylvie Testud ont été successivement pressenties pour incarner Anna, tout comme François Cluzet pour le rôle du Dr Zanevsky.
Le réalisateur, Michel Spinosa, voulait tout d'abord faire un film sur la jalousie. Puis après avoir fait quelques recherches, il est tombé sur le livre de Daniel Lagache, La jalousie amoureuse, qui traitait de cas cliniques comme les jaloux pathologiques ou les érotomanes. Il ne connaissait pas cette dernière psychose qui touche principalement les femmes, et comme il souhaitait faire un film avec comme personnage principal une femme amoureuse, il s'est orienté dans ce sens. Il a alors lu plusieurs écrits, des thèses, des articles et des ouvrages sur ce sujet.
Le cinéaste a commencé par écrire une biographie d'une cinquantaine de pages de son héroïne, Anna, puis en a tiré un scénario.
Proche du délire paranoïaque, l'érotomanie est une psychose qui consiste à croire de façon extrême et illusoire d'être aimé par une personne. Cette maladie rare touche principalement les femmes, qui sont persuadées d'être aimées et finissent par harceler l'homme sur lequel elles ont jeté leur dévolu. L'état passionnel dans lequel est plongé la personne se déroule en trois phases : l'espoir, le dépit et la haine. Lors des deux dernières phases, les symptômes peuvent dégénérer et devenir dangeureux. La personne peut alors agresser physiquement sa victime, mais s'en prend le plus souvent à elle-même.
Plusieurs films ont déjà traité de l'érotomanie, notamment dans Un Frisson dans la nuit de Clint Eastwood, Liaison fatale avec Glenn Close et Michael Douglas et A la folie, pas du tout de la française Laetitia Colombani.
Michel Spinosa a recommandé à Isabelle Carré de regarder plusieurs films pour s'inspirer de son personnage : Thérèse d'Alain Cavalier, Claire Dolan de Lodge H. Kerrigan, Rosemary's Baby et Répulsion de Polanski. Elle avoue également s'être inspirée des personnages de Robert De Niro dans Taxi Driver et celui de Gene Hackman dans French Connection.
Le cinéaste a choisi Isabelle Carré pour interpréter son héroïne, Anna, car il voulait une actrice capable d'incarner "le vertige de la folie tout en amenant le spectateur à être en empathie avec le personnage le plus longtemps possible (...) Il y a chez elle une très grande force et une délicatesse qui lui sont propes.".
A propos de son travail de composition pour le personnage d'Anna, Isabelle Carré confie : "Anna M. est certainement mon personnage le plus violent. Il y avait un vrai travail à faire. Il fallait que je sois crédible, moi qui ai un aspect, une image qu'on dit souvent très lisse, ou très douce, bien que cela ne soit évidemment pas toujours le cas dans la vie. Alors forcément, ce personnage, avec ses différents états de violence, avait tout pour m'attirer. J'avais envie de me confronter à ce qu'elle se fait subir, ainsi qu'à la manipulation mentale qu'elle impose aux autres.". Pour composer au mieux Anna, elle a lu un livre dont l'auteur est psychiatre et qui recueille plusieurs lettres d'érotomanes, témoignant de leur désespoir et de leur pensées les plus intimes. Elle a également rencontré un psychiatre qui lui a expliqué en détail cette maladie.
Isabelle Carré a été assez éprouvée par ce rôle, autant physiquement que moralement. Au-delà de la maladie psychiatrique d'Anna et du tournage au milieu de la nuit, elle a été très marquée par une scène où elle devait brutaliser deux petites filles. De par la nature de son personnage, elle était un peu plus isolée que d'habitude sur le plateau, s'imprégnant des musiques d'Anna, notamment Blonde Redhead et CocoRosie, conseillées par le réalisateur.
Le réalisateur a délibérément mis le même tableau dans la chambre d'Annna et dans l'univers du Dr Zanevsky, l'homme qu'elle harcèle et qui est interprété par Gilbert Melki. Selon Spinosa, "C'est un élément très important. C'est une toile de Zurbaran qui se trouve au Musée de l'Hermitage à Saint-Pétersbourg. Je l'ai choisie pour l'influence baroque qu'elle donne à l'histoire. Une influence qui passe par la lumière et les teintes dont le tableau est comme une charte de couleurs pour le film. Par ailleurs, cette toile pour Anna est un miroir qui lui est tendu de son enfance et dans laquelle elle se reconnaît. Accrochée au-dessus de son lit, cette peinture est comme une petite soeur, un double avec lequel elle dialogue sans doute. Enfin ce tableau est un indice qui permet à Anna de retrouver à la fin la piste de cet homme qu'elle aime et qu'elle poursuit. Lui aussi est connecté avec ce tableau, et c'est pour Anna le signe le plus absolu que cet homme-là ne pense qu'à elle et lui est destiné."