A l'origine, John Cassavetes ne devait pas jouer dans Love Streams mais quelques semaines avant le début du tournage, Jon Voight (qui devait reprendre son rôle du théâtre à l’écran) lui a annoncé vouloir réaliser lui-même le film. Cassavetes l'a donc évincé du projet et l'a remplacé à contre-coeur. Ce changement de dernière minute l'a contraint à réécrire le personnage de Robert Harmon : "Ç’a été très délicat. J’en ai voulu à Jon de nous avoir abandonnés. Du coup, il y a eu de nombreux changements. Je n’ai ni la personnalité de Jon, ni son tempérament. Et je ne parle même pas de la ressemblance physique qui existe entre lui et Gena. Ils sont blonds tous les deux ; et ils donnent vraiment l’impression d’avoir un air de famille".
La mère de John Cassavetes est morte six semaines avant le début de tournage de Love Stream. Le cinéaste, qui avait déjà perdu son père quelques années auparavant, évoque avec son film son rapport à la famille : "Love Streams m’a aidé à poser des questions : qu’est-on sans famille ? S’il ne vous reste qu’un proche, quel rapport avoir avec lui ? Comment exprimer son amour ? Mourrons-nous sans jamais avoir exprimé quoi que ce soit ? Poursuivrons-nous notre existence sans jamais rien exprimer ? Et ce questionnement me semblait très intéressant, parce qu’il explorait un sujet capital. C’est le film le plus triste que j’ai jamais réalisé, sans conteste".
Le tournage de Love Streams a commencé au printemps 1983 alors que John Cassavetes était déjà sérieusement malade. Il décèdera en février 1989 des suites de sa cirrhose.
Love Streams fait partie des huit films réalisés par John Cassavetes dans lesquels sa femme Gena Rowlands joue, après Un enfant attend (1963), Faces (1968), Ainsi va l'amour (1971), Une femme sous influence (1974), Opening Night (1977), Gloria (1980) et Tempest (1982). Après le décès de son mari en 1989, elle tournera sous la direction de son fils Nick Cassavetes et de sa fille Zoe Cassavetes, perpétuant ainsi le tournage en famille cher à John.
John Cassavetes a décidé de modifier complètement les 30 dernières minutes du film après le vif succès de la première projection en salle, sous le prétexte de ne pas vouloir donner au public ce qu'il attendait.
John Cassavetes voit Love Streams comme un moyen de se faire pardonner auprès de sa femme Gena Rowlands pour avoir été un mari absent. Le metteur en scène explique : "Pendant des années, je n’ai pensé qu’à moi. J’invoquais le droit des artistes à n’être bridé par rien ni personne. Et puis j’ai voulu faire un film pour Gena, pour me faire pardonner d’avoir gâché la vie de mon épouse depuis si longtemps, en ne cessant de tourner, de me saouler, de m’éloigner en permanence de la maison. Ce qui, pourtant, ne l’a pas empêchée de rester à mes côtés, même enceinte, enfant après enfant. Ce film est un hommage à toutes les saloperies que j’ai pu lui faire." (Propos recueillis par Ray Carney, Cassavetes on Cassavetes, Éditions Faber & Faber, 2001, extrait traduit par Gilles Boulenger et Jean-Pascal Grosso pour Libération (11 juin 2003))
Après avoir produit Chuck Norris, Sylvester Stallone et d'autres acteurs musclés spécialistes du film d'action, les producteurs Menahem Golan et Yoram Globus, directeurs de la société Cannon, cherchaient à acquérir une sorte d'éthique cinématographique. Avant de faire faillite en 1987, ils ont ainsi produit John Cassavetes (Love Streams), Robert Altman (Fool for love), Franco Zeffirelli (Otello), ou encore Jean-Luc Godard (King Lear).
Love Streams a principalement été tourné dans la maison de John Cassavetes et Gena Rowlands à Hollywood Hills, là où la plupart de leurs films se sont faits.
Le producteur Menahem Golan se souvient de sa collaboration avec John Cassavetes sur Love Streams : "Cassavetes. Il donnait tout au cinéma. Il a tourné le film (Love Streams) dans sa propre maison, à Los Angeles. Mais il détestait Hollywood et a monté le film à New York. Il m’a appelé pour me dire que le montage était fini, j’ai pris l’avion. Le film faisait deux heures et quart. Je lui ai demandé de couper un quart d’heure. Il m’a dit de revenir une semaine plus tard. Et quand je suis revenu, le film faisait trois heures. Je lui ai demandé s’il était fou."