Alors que l'on pourrait s'attendre à un film d'horreur plutôt classique centré sur des insectes (qu'ils soient géants, mutants ou juste tueurs), nous sommes en réalité devant un film pratiquement expérimental. Réalisé par Saul Bass, créateur d'affiches et de génériques qui ont marqués le cinéma des années 50 à 90, et sorti en 1974, le film raconte l'histoire de fourmis devenant de plus en plus malignes, jusqu'à vouloir prendre le contrôle du monde. Mais tout commence en plein cœur du désert où deux chercheurs vont étudier leur comportement. Le film nous met directement dans le ton avec un montage plutôt expérimental illustrant une voix off, celle d'un des deux personnages principaux. Ensuite, film d'insectes classique avec la découverte des fourmis, de ce qu'elles sont capables de faire etc. Et puis, du moment où les personnages rentrent dans la sphère pour étudier ces dernières, le film part dans de l'expérimentation avec même un côté documentaire. Car oui, on a quand même dix minutes, au début du film, où l'ont voit diverses fourmis filmées en macro, scènes que j'ai trouvé passionnantes. Et c'est là où nous sommes presque dans l'effet documentaire car on voit juste les fourmis s'activer en groupement afin de contenter leur reine. C'est ici juste la voix off qui apporte l'effet science-fiction, portant alors un tout autre sens aux images que l'on a sous les yeux. Mais le film va plus loin dans l'expérimentation (enfin pour un film du genre du moins), qui ne se concentre finalement que très peu sur le côté "horreur" du film mais plus sur l'aspect humain, ayant même un discours misanthrope. C'est en effet un film qui juge constamment ses personnages en les mettant toujours en opposition aux fourmis. Tandis que ces dernières forment une intelligence collective, sont organisées, dévouées les unes aux autres et s'allient contre une même cause, les humains montrent un comportement désorganisé, impulsif, quelques-fois violent et imprudent, incapables de communiquer ensemble. Il y a par ailleurs deux scènes particulièrement parlantes que l'on peut mettre en parallèle : lorsque l'un des deux scientifiques restent froid et inexpressif devant quelques morts humains tandis que les fourmis rapatrient soigneusement leurs pertes. On a de plus une très bonne mise en scène, néanmoins bien trop timide lorsqu'il s'agit de filmer les humains, comme si le réalisateur était finalement perdu quant il s'agit de filmer des situations "normales". Nous avons par ailleurs la fin alternative qui est, encore une fois, particulièrement expérimentale et représente une œuvre d'art à elle seule, visuellement et sensoriellement parlant. "Phase IV" est donc pour résumer un très bon film sur la vanité humaine.