Force est de reconnaître que ce classique du film de cape et d'épée et des soirées télé à l'époque des fêtes a pris un méchant coup de vieux. Principaux responsables: George Sidney et ses monteurs Kern et Boemler (pourtant professionnels reconnus), qui sont incapables de donner la moindre tension dramatique au film: on enchaîne séances d'action et scènes parlées explicatives, sans le moindre rythme, sans pauses, en usant et abusant des ellipses ou des raccourcis narratifs. A leur décharge, le roman de Dumas est long, complexe et composé de plusieurs sous-histoires qui ont peu à voir les unes avec les autres. Il aurait fallu faire des choix, mais Sidney s'y est refusé. Son film est donc une succession assez décousue de séquences parfois efficaces, parfois surjouées et artificielles. Le plateau, inégal, est facilement dominé par trois acteurs. Gene Kelly, bondissant et charmeur, est un choix inattendu mais payant - d'autant que Sidney, spécialiste du film musical, le connaissait bien et savait mettre en valeur ses qualités de danseur dans les scènes d'escrime - il récidivera quelques années plus tard avec Mel Ferrer dans "Scaramouche". Lana Turner est une Milady à la perversité de haut vol, Vincent Price un Richelieu mielleux très plaisant à voir et à entendre. Pour le reste... Athos juste correct, Porthos et Aramis transparents, Constance (June Allyson) trop âgée et fadasse (mais reconnaissons que le personnage est tel dans le roman) et une galerie de seconds rôles très oubliables: Louis XIII, Anne d'Autriche, Tréville, Planchet, Rochefort, Buckingham, Jussac, de Wardes... J'aime bien les apparitions de Marie Windsor, future reine de la série B qui se contente de passer deux ou trois fois à l'écran avec une mimique voulant dire "regardez-moi, je suis une espionne du cardinal!". Tout ça a un charme désuet, mais il faut vraiment être bon public.