Elle & lui & le reste du monde est le premier film de Emmanuelle Belohradsky. Cette dernière a d'abord travaillé en tant que journaliste, puis a appris l’écriture cinématographique à l’atelier scénario de le Fémis, où elle a fait la rencontre du réalisateur Jérôme Boivin (qui est devenu mon partenaire d’écriture). Elle explique ce qui l'a poussé à la mise en scène : "La rencontre avec les producteurs de Marvelous Productions, Romain Le Grand et Vivien Aslanian : c’est eux qui m’ont convaincue."
"En lisant le scénario, Romain avait pensé à After Hours et il se trouve que ce film de Scorsese était notre référence à l’écriture, même si nous voulions conserver jusqu’au bout cette idée d’un garçon partant à la recherche d’une fille dont la voix l’a fait rêver au début d’une longue nuit. Romain et Vivien pensaient que je devais réaliser ce film, aller moi aussi au bout de mon idée."
Pour Elle & lui & le reste du monde, Emmanuelle Belohradsky avait en tête After Hours de Martin Scorsese, mais aussi l’univers de Paul Thomas Anderson (Punch-Drunk Love, Licorice Pizza). Elle précise : "Côté français, les comédies de Pierre Salvadori ou Cédric Klapisch m’inspirent... L’univers que j’avais imaginé pour Elle & lui & le reste du monde n’était pas du tout naturaliste mais plutôt celui d’une fable. Il fallait donc s’amuser avec les décors pour que le spectateur se retrouve dans des endroits complètement décalés."
Elle & lui & le reste du monde a mis plusieurs années à se monter et, au départ, Emmanuelle Belohradsky avait un autre comédien en tête pour Marco. Elle se rappelle : "Sauf qu’entre temps, il était devenu trop âgé pour le rôle. Quelqu’un m’a parlé de Victor que je n’avais alors vu que dans Mon bébé, le film de Lisa Azuelos dans lequel il n’a que quelques répliques. J’étais assez impressionnée par ce patronyme Belmondo."
"Je ne parvenais pas à faire abstraction de tout le clan pour visualiser ce jeune comédien ! Et puis j’ai rencontré ce garçon absolument charmant, pas du tout dans l’attitude du petit-fils d’une immense star du cinéma français. Victor est quelqu’un qui travaille énormément : pour les essais je lui avais demandé d’apprendre une scène de plusieurs pages qui n’était pas dans le film, pour ne pas user celles que nous allions tourner."
Emmanuelle Belohradsky a confié le personnage de Bulle à Galatea Bellugi. Un rôle qui n’a pas été évident à attribuer, comme s'en rappelle la cinéaste : "J’ai vu plusieurs actrices en cherchant d’abord une voix. Je voulais un timbre très particulier, quelque chose qui nous accroche et nous emmène ailleurs. Galatea que j’avais vue et aimée dans tous ses films a ce quelque chose dans la voix. Difficile de dire d’où elle vient. On ne peut pas la 'régionaliser' ! Elle est mi-danoise, mi-italienne avec ce petit truc venu d’ailleurs qui me plaisait."
"Nous nous sommes ensuite rencontrées et il s’est passé quelque chose d’amusant : j’étais avec mon chien sans savoir qu’elle en a très peur. Donc dès qu’il bougeait ou faisait un bruit, Galatea était en panique, tout en essayant de rester concentrée, et ça s’est terminé en fou-rire. J’ai trouvé ce moment très joli. J’étais alors convaincue qu’elle pouvait jouer le rôle de Bulle, une fille capable de sauter du coq à l’âne, de passer d’une seconde à l’autre du rire aux larmes, quelqu’un qui pense en arborescence et n’est jamais là où on l’attend."
Dans Elle & lui & le reste du monde, les ascenseurs sont représentés comme des personnages à part entière. Emmanuelle Belohradsky raconte : "L’idée m’est venue au cours d’une discussion anodine avec un jeune musicien. Il m’a raconté qu’il allait enfin pouvoir vivre de sa musique et arrêter un boulot purement alimentaire qu’il faisait la nuit dans un centre qui gère les appels d’urgence de personnes coincées dans des ascenseurs. Son récit a aussitôt ouvert tout un imaginaire en moi. Car ces gens ne sont pas des techniciens, ils sont là pour gérer la solitude, le temps qui passe et l’angoisse des gens captifs dans leur cabine."
"J’y ai vu une histoire singulière : un type, seul au bureau, recevant en pleine nuit un appel d’une inconnue, le tout se transformant en début d’une histoire d’amour. Ce n’est quand même pas commun de tomber amoureux d’une voix ! Partir chercher cette personne dans la nuit sans savoir à quoi elle ressemble non plus... J’y voyais un pas de côté décalé, une vraie promesse de cinéma..."