Pas besoin d'être un nostalgique de la monarchie de l'ancien régime pour comprendre que la Révolution française, dans ses excès idéologiques, a commis des injustices. Mais pas seulement : la Convention, en guillotinant Louis XVI puis Marie-Antoinette avant de laisser leur fils de 10 ans, Louis XVII, croupir dans un cachot sombre et humide où il est mort isolé après avoir été brisé psychologiquement (en plus d'avoir été battu et très probablement abusé sexuellement par un homme qui avait sa garde), a commis un crime d'état épouvantable qui ne s'accorde guère avec un idéal de justice et d'égalité.
Le Déluge ne dénonce pas tout cela. Il se contente de nous faire partager avec subtilité les jours d'emprisonnement de la famille royale, la chute des Dieux qui deviennent des hommes puis des cadavres.
Tout cela avec une tenue, une rigueur et une profondeur qui place le spectateur en situation d'apnée, en lecteur-témoin qui développe de l'empathie non pas pour la monarchie (comme certains ont pu bêtement le prétendre) mais pour des êtres humains, pour une famille injustement malmenée.
Tout y est admirable, le casting idéal, la mise en scène, les lumières, les costumes, les décors, la musique et le scénario.
S'il fallait absolument trouver une petite faiblesse, alors celle-ci est à chercher dans les rares plans en image de synthèse. Mais c'est négligeable.
Cependant, Le Déluge étant un film supérieurement intelligent, il n'est pas fait pour être apprécié par des spectateurs incultes biberonnés aux productions Netflix et qui consomment des films comme s'il s'agissait de repas de fast food. Il n'est pas fait non plus pour les multiples spécialistes de la Révolution française qui pullulent soudainement sur les réseaux-sociaux et qui déversent leur grand savoir sur ce film qui ne correspond pas aux idées toutes faites qu'ils détiennent dans leur caboche.
Actuellement, ce film semble malheureusement être incompris par beaucoup de gens. Ce qui, en réalité, parle plus de notre époque d'abrutissement généralisé que de la valeur intrinsèque de ce très grand film. C'est comme si une majorité de spectateurs n'était pas encore prête à lâcher ses illusions naïves sur la Révolution française.
Mais il est à parier que ce film finira, avec le temps, par être reconnu pour ce qu'il est : un film extraordinaire, d'une maîtrise rare.