Une très belle et grave histoire d'amour secret, qui finit ... bien ou mal, le spectateur choisira (la chute m'a semblé assez claire, même si le film peut laisser à ceux qui en ont envie la possibilité de croire à une autre fin).
Toute l'intelligence du film est dans la confrontation des points de vue (celui de la mère, ceux des adultes) à la réalité (celle vécue par les deux enfants), qui permet au spectateur de comprendre progressivement ce qui s'est passé. Les adultes, qui ne voient qu'une infime partie de la réalité des enfants, et qui croient, comme nous tous, ce qu'ils ont envie de croire, se trompent, parfois dramatiquement, en accusant les mauvaises personnes. Les enfants mentent pour se protéger. Les adultes se mentent à eux-mêmes (et mentent à l'occasion aux autres), pour se protéger ou pour protéger ce à quoi ils tiennent (la réputation de l'école par exemple).
S'il y a bien un coupable plus coupable que les autres (et, spoil, ce n'est pas un enfant), personne, ou presque, n'est complètement innocent. Les adultes sont aveugles parce qu'ils ne veulent pas voir. Les enfants, qui comprennent certaines choses bien mieux que les adultes, sont cruels et impitoyables entre eux, et reproduisent les préjugés des adultes.
Plutôt que d'innocence, le film parle de ce qu'on cache ou de ce qu'on se cache à soi-même. Sa force est que s'il n'épargne personne, il ne condamne personne non plus. Sa force est aussi son universalité : même si l'histoire se passe au Japon, elle pourrait se passer n'importe où (on pense par exemple au harcèlement à l'école).
Il est vrai que la compréhension du film exige un peu d'efforts de la part du spectateur : la vérité de chaque événement, et du film dans son ensemble, étant la somme des vérités de chaque personnage, vérités que le film donne à voir à mesure qu'il avance, il faut rester éveillé du début à la fin.
C'est notamment pour cette raison qu'on aurait envie de le revoir. Mais c'est aussi parce qu'il est beau : la scène où la directrice et l'enfant jouent ensemble du clairon ("ce que tu ne peux pas dire, souffle-le") est une pure merveille, comme celle où les deux enfants jouent au "Qui suis-je" dans le wagon ...
Ce n'est certes pas le film qu'il faut aller voir pour se remonter le moral. Mais c'est un film très beau et très fort.