Quand on n'est pas sûr d'avoir tout compris en sortant d'un cinéma, on se dit que le film a des défauts (en général, on n'est pas enclin à reconnaître qu'on peut être soi-même la cause du problème). Le film serait donc mal ficelé, et c'est forcément la faute au réalisateur, qui a compliqué les choses...
C'est un fait, c'est un film complexe. Dans sa forme, et dans son contenu, à la fois. Complexe comme l'est d'ailleurs l'être humain et sa psychologie. Encore plus complexe que ça : comme l'est l'enfant. Mais aussi comme peut l'être une enquête policière, ou la justice à rendre, surtout. Et finalement, encore un peu plus quand ça se passe au Japon ! - Le pays de la politesse, des courbettes, de la discrétion... qui parfois nous semble compassé.
L'histoire n'a pas vraiment un début et une fin (elle est pourtant revisitée, diversement, par des flashbacks) ; elle n'a pas non plus de personnages principaux et de personnages secondaires (tous les personnages finissent par devenir principaux). Et pourtant, l'histoire est palpitante, surprenante ; il y a un véritable suspense, il y a beaucoup d'émotions, qui réveillent en nous de la compassion, de la colère, de l'incompréhension (justement) - pas une seconde n'est comique ou relaxante. On est fatigué d'être subjugué, en quelque sorte...
C'est un film philosophique. On ne compte pas les propos dignes d'être encadrés, de figurer au-dessus de la cheminée ou sur un fronton. Même s'il faut du temps pour les digérer. D'ailleurs la difficulté se loge jusque dans le titre ("monstre" au festival de Cannes, "l'innocence" maintenant - quel rapport ? et pourtant il y en a un).
C'est un film militant aussi, qui dénonce le conformisme de tous, l'irrespect envers l'autre, quel que soit l'âge. Avec une petite déclinaison pour la société japonaise (le recours à l'alcool, le "bar à hôtesses", la délicatesse...). Militant et courageux (on n'imagine pas, au cinéma ou dans la vie, un gamin avouer qu'il est amoureux d'un autre).
A.G.