Ce film a été présenté à Cannes Première au Festival de Cannes 2024.
Le titre du film s'est imposé en cours d'écriture à Alain Guiraudie. Pour lui, la miséricorde, "c’est l’idée de l’empathie, de la compréhension de l’autre au-delà même de toute morale. C’est l’élan vers l’autre. C’est un mot désuet qu’on n’emploie plus beaucoup, et ça correspond très bien au film, à son côté intemporel, et surtout à l’un des grands personnages du film : le curé."
Encore plus que dans ses films précédents, le réalisateur affirme avoir voulu cultiver le plus possible le mystère, laissant volontairement le flou sur les intentions du héros et les relations entre les personnages. Il a fait ce choix d'une part pour que le spectateur soit actif, et d'autre part parce qu'il s'agit selon lui de la meilleure transcription du désir, "Qui reste toujours, pour moi, le grand mystère de la vie." Il ajoute : "je suis aussi beaucoup intéressé par le trouble que peut amener cet inconnu et ses intentions pas très claires. J’aime qu’on ne sache pas qui est le méchant, et qu’on ne sache pas trop de quel côté se situer."
Contrairement à la plupart des films d'Alain Guiraudie, Miséricorde se déroule en automne car il s'agit d'une œuvre crépusculaire, s'ouvrant sur un enterrement et s'achevant dans un cimetière. Le réalisateur précise : "Un homme revient sur le lieu de son adolescence, de sa prime jeunesse et s’y retrouve peu à peu emprisonné. L’automne sied bien aux thèmes du film. L’automne est mélancolique. Il offre de belles lumières, de belles couleurs. Et il amène aussi son lot d’intempéries, le brouillard, le vent."
Le réalisateur a puisé dans les films noirs d'Alfred Hitchcock et Fritz Lang, ainsi que chez Ingmar Bergman : "Ça n’a pas grand-chose à voir avec le film noir mais chez Bergman il y a une grande miséricorde. Une façon d’aimer les êtres malgré et surtout en dépit de tout. Ses films sont à la fois très maîtrisés, très calmes et en même temps traversés d’une vraie noirceur." En revanche, il ne se reconnaît pas dans la filiation avec Claude Chabrol qu'on lui partage souvent : "il y a souvent chez lui ce côté goguenard, ironique, qui me pose problème. Je suis très proche de mes personnages. Je mets en chacun d’eux une part de moi-même."
Avec Miséricorde, Félix Kysyl tient son premier premier rôle au cinéma. On a pu auparavant le croiser dans Le Redoutable, Des hommes et Le Consentement. C'est dix ans plus tôt, via le casting d'un film qu'il n'a pas tourné, qu'Alain Guiraudie a remarqué le comédien : "J’avais gardé son nom dans un coin de ma tête. J’aime sa façon à la fois instinctive et travaillée de jouer les scènes. Il a quelque chose de très contemporain, c’est un jeune homme d’aujourd’hui et en même temps dans ses attitudes, dans sa façon d’être, un truc un peu intemporel qui me rappelle le cinéma d’avant. [...] Et surtout il est très complexe, je crois que c’est ce qui m’avait déjà impressionné chez lui à l’époque. Il peut être à la fois ange et démon."
Au casting de Miséricorde on retrouve Jean-Baptiste Durand, réalisateur de Chien de la casse. Après des petits rôles, notamment dans des courts-métrages, il s'agit là de son premier grand rôle à l'écran. À l'époque du casting, Chien de la casse n'était pas encore sorti et Alain Guiraudie ignorait que Durand était cinéaste. Il déclare : "Lui, c’est un personnage, une figure forte. C’est pas le genre de comédien qu’on voit souvent dans les castings. Immédiatement, j’ai su qu’il avait sa place dans le film, pour sa façon d’être mais aussi pour la simplicité de son jeu."