L’histoire d'une famille permet au réalisateur de brosser à sa façon un portrait de l’Iran d’aujourd’hui, avec la disparition progressive de la classe moyenne, avec le poids des traditions qui pèse toujours chez les personnes âgées, avec de plus en plus de jeunes qui finissent par baisser les bras face à ce que leur propose le régime politico/religieux en place, avec l’importance du patriarcat qui ne se dément pas, avec le rôle subalterne laissé aux femmes alors que, bien souvent, ce sont elles qui pourraient sortir du marasme aussi bien les familles que le pays. Un portrait à sa façon … Une façon très différente de ce que pratiquent les grands réalisateurs iraniens dont on suit le cinéma depuis des années, tels Asghar Farhadi ou Jafar Panahi.
C’est justement dans la façon choisie par Saeed Roustaee de faire du cinéma qu’on va trouver les éléments susceptibles de mettre un frein à un enthousiasme quelque peu prématuré concernant ce réalisateur. Tout d’abord, la longueur de ses films : 2 h 14 pour "La loi de Téhéran", c’était déjà limite ; 2 h 45 pour" Leila et ses frères, c’est trop" ! Cela donne une première partie du film épuisante avec des discussions familiales qui n’en finissent pas. Le réalisateur le reconnait : « lorsque les choses doivent être clairement explicitées par les personnages, il peut leur écrire des dialogues jusqu’à plus soif ». En fait, avec Leila et ses frères, on a droit à 2 films pour le prix d’un : d’un côté, un film bavard et fatigant, de l’autre, un film à la fois plus intéressant et offrant des passages dans lesquelles la virtuosité est de mise dans la mise en scène. Toutefois, là aussi, l’enthousiasme doit être tempéré : comme dans "La loi de Téhéran", Saeed Roustaee s’inspire trop ostensiblement d’œuvres existantes. Ici, c’est du côté du cinéma italo-américain de Visconti et de Coppola qu’il lorgne. Alors, certes, c’est beau, c’est grandiose, mais, pour vraiment devenir un grand réalisateur, il faudrait que Saeed Roustaee arrive à faire un grand film qui soit du … Saeed Roustaee. Il n’a que 33 ans, il devrait y arriver !