En 2015, Eric Guéret a réalisé un film aux urgences de l’hôpital Avicennes de Bobigny. Il y racontait déjà la dégradation de notre système de santé et la fatigue des équipes soignantes. Avec Premières Urgences, il a voulu poursuivre cette démarche en interrogeant la politique de rentabilité appliquée aux hôpitaux publics, tout en montrant leur beauté et leur nécessité : "À l’heure ou l’hôpital va plus mal que jamais il me semble indispensable de rappeler le cœur de sa mission de service public."
Premières Urgences s'intéresse au parcours de jeunes internes qui font leur premier stage. Le réalisateur a choisi de suivre ces soignants qui sont confrontés pour la première fois à leur responsabilité de médecin : "Ils sont plein d’enthousiasme et de désir de faire au mieux. Leur avenir est incertain. Je cherche à savoir si leur vocation résistera à l’état de l’hôpital public qu’ils vont découvrir."
L'hôpital ne connaissait la liste des internes que dix jours avant le début du stage. Eric Guéret n'avait donc que très peu de temps pour les rencontrer. Il a pu toutefois s'entretenir avec chacun d'entre eux pour leur présenter son projet. Cinq internes ont accepté d'être filmés : "j’ai eu un petit coup de chance car ils sont parfaits. Amin, Hélène, Evan, Lucie et Mélissa ont entre 22 et 25 ans. Ils sortent de la faculté de médecine de Bobigny, à quelques kilomètres de l’hôpital. Trois filles et deux garçons avec des profils très complémentaires. Des différences très riches pour le film comme leurs sensibilités, leurs engagements, leurs projets d’avenir, leurs visions du rôle de médecin, leur profil sociaux et culturels."
Le réalisateur a choisi de poser sa caméra dans l'hôpital Delafontaine de Saint-Denis car il s'agit d'un grand hôpital de périphérie, semblable à ceux que l’on peut trouver dans beaucoup de villes françaises. Situé au cœur d’un désert médical urbain, il est représentatif de ce qui se passe dans de nombreux territoires, et pas seulement à la campagne. Il précise : "D’autre part la Seine-Saint-Denis fait face comme tous les grands centres urbains périphériques à la paupérisation de sa population, à l’arrivée de populations migrantes, à la solitude des personnes âgées et à toutes les fragilités sociales que l’hôpital doit gérer. Enfin, il était important pour moi de ne pas m’installer dans un endroit où la situation serait extrême. Je ne voulais pas être au cœur d’un service d’urgence chaotique. J’aime filmer les problèmes de notre société en les abordant par les solutions. Par la face lumineuse plutôt que par les côtés obscurs."
La bande originale du film est composée par le musicien électro Cascadeur. Le réalisateur voulait une musique aérienne et subtile, sans pathos ni dramatisation. "Il me semblait indispensable que la musique nous aide à respirer dans un endroit où on ne respire pas très bien. Il fallait qu’elle puisse participer à la narration mais qu’elle le fasse en ouvrant des fenêtres. Je suis venu chercher dans sa musique de la lumière, même dans les moments sombres ou durs."