L'acteur John Garfield -vu notamment dans Le facteur sonne toujours deux fois- détenait depuis plusieurs années les droits du roman d'Algren, mais n'a jamais pu tourner le film. Otto Preminger - à cause de la censure hollywoodienne, il était impossible d'employer le terme "drogué" à l'écran. Lorsque Preminger s'attelle à L'Homme au bras d'or, la MPA, chargée de veiller à l'application du code Hays, refuse de donner un visa à ce film dont le héros est un junkie-une première dans le cinéma américain. Le film sera distribué par United Artists malgré cet avis défavorable. C'est la deuxième fois, après La Lune etait bleue, que le cinéaste défie le code Hays, qui verra peu à peu son influence décroître et disparaîtra à la fin des années 60.
L'Homme au bras d'or est l'adaptation d'un roman de Nelson Algren. S'il est né à Detroit, l'écrivain, qui fut l'amant de Simone de Beauvoir (avec qui il entretint une correspondance devenue fameuse) a surtout été rendu célèbre par ses descriptions de Chicago et de ses laissés-pour-compte. En 1962, Edward Dmytryk adapte un autre de ses livres, Walk on the wild side (La Rue chaude avec Jane Fonda).
La musique de L'Homme au bras d'or est l'une des premières que signa Elmer Bernstein, l'un des plus grands compositeurs du XXe siècle. Elle lui vaudra la première de ses quatorze nominations aux Oscars. Décédé en août 2004 à l'âge de 82 ans, on doit à Bernstein la musique de plus de 250 films, parmi lesquels Les Dix Commandements, Les Sept mercenaires ou La Couleur de l'argent.
En 1956, L'Homme au bras d'or décroche trois nominations aux Oscars : l'une pour Frank Sinatra (mais c'est Ernest Borgnine, pour Marty, qui sera sacré Meilleur acteur), la musique et les décors.
La célèbre affiche du film, sur laquelle est dessiné le bras d'un drogué, est l'oeuvre de Saul Bass. Ce designer formé à Brooklyn et influencé par les artistes allemands du Bauhaus fait connaissance avec Otto Preminger lorsque celui-ci travaille sur La Lune etait bleue. Le cinéaste lui demande de s'occuper de la campagne publicitaire de ce film qui fait scandale plusieurs semaines avant sa sortie - il est jugé trop osé par l'Eglise et le code Hays. Bass conçoit l'affiche et le générique du film, et collaborera avec le réalisateur sur la plupart de ses longs-métrages suivants, par exemple Autopsie d'un meurtre. Parmi les fameux génériques signés Bass, dont le graphisme simple, évocateur et très moderne, exercera une grande influence sur les artistes et les publicitaires contemporains, on peut citer celui de Psychose d'Hitchcock. Après s'être tourné vers la communication d'entreprise à la fin des années 60, il sera contacté par Martin Scorsese dans les années 90, signant les génériques de plusieurs de ses films, dont Casino.
Frank Sinatra et Kim Novak seront réunis deux ans plus tard par George Sidney dans La Blonde ou la rousse - celle-ci étant Rita Hayworth...
Marlon Brando avait été pressenti par Preminger pour tenir le rôle finalement interprété par Frank Sinatra.
Le cinéaste révèle dans ses mémoires qu'il a failli réaliser, après L'Homme au bras d'or, un autre film avec Frank Sinatra : Le Parrain... "Vingt ans après [L'Homme au bras d'or], La Paramount me demanda de réaliser The Godfather. Je pensai alors à Sinatra pour ce rôle et lui fis parvenir le livre.Je proposai même de supprimer le personnage du chanteur que l'on aurait pu croire écrit pour lui. Mais Sinatra ne voulait pas faire le film. Et je n'avais pas envie de le faire sans lui. Ce fut donc le casting à rebours de L'Homme au bras d'or. Cette fois, Brando prenait le rôle..." Et c'est bien sûr Francis Ford Coppola qui réalisait le film...