Il s'agit de l'un de mes Mocky préférés ! Sans être un fan, je pense les avoir tous visionnés. Je suis un des chanceux propriétaires du coffret 56 DVD « Mocky sème encore la zizanie ».
On parle de cinéma insoumis ! C'est tout à fait ça ! Un point commun avec tous ses films, le critère « fauché » et parfois l'approximatif qui en découle ! Pourtant, du talent, Mocky en a et, de plus, il véhiculera des idées souvent caricaturales mais qui ressortent d'autant plus que ce style imparfait agit comme un « faire-valoir » ! Plus le sujet sera fort, plus le film paraît à côté de la plaque et, paradoxalement, le message en ressort grandi ! Chaque Mocky constitue une expérience unique !
Ici le film traite d'un sujet qui me tient à coeur, un sujet rarement traité au cinéma, je ne peux que l'en remercier pour ça ! Je parlais du budget minimaliste comme d'une caractéristique propre à tout Mocky, c'est toujours le cas ici mais il conviendra d'avouer que le nombre de figurants présents pour l'effet de masse du match de foot du début est impressionnant ! De manière générale, il faut reconnaître que, visuellement parlant, le film en jette ! Il est propre et, de plus, audacieux en bien des points. Regrettons les quelques séquences moins maîtrisées qui feront descendre le rythme, particulièrement ce dialogue quasi final entre Mocky-Serrault-Mitchell qui aurait dû être une scène importante... Nous lui pardonnerons facilement tant le résultat global est génial !
Le sujet principal : la folie/bêtise des hommes lors des matchs de foot, spécialement quand ceux-ci sont décisifs (coupe du monde etc...). Le film se base sur des faits totalement réels revisités par le roman car, si l'histoire débute de la même façon (un coup de sifflet décisif en défaveur de l'équipe nationale qui se venge sur l'arbitre jusqu'à sa mort), elle finit par l'accusation des supporteurs (les réels coupables) dirigée contre des noirs et ajoute une note de racisme en plus.
Mocky, n'ayant pas les moyens de se procurer un grand nombre d'acteurs noirs, ne parlera pas de cette deuxième partie pour se concentrer sur la première.
Serrault joue donc cet ennemi de la société, ce personnage qui peut faire, lors de ces événements, ce qu'il ne peut pas faire dans sa vie. Frustré dans sa vie, comme le sont beaucoup de supporteurs, il peut enfin libérer tout ce qu'il a de rage en lui ! Serrault joue à la perfection ce rôle de meneur fou... « Tout ça pour un pénalty » phrase finale que lui lâchera Mocky qui vient se poser sur l'oeuvre comme une conclusion faisant ressortir le côté grotesque de l'histoire.
Daniel Auteuil devait jouer le rôle d'Eddie Mitchell qui fut dès lors choisi suite au refus du premier. Eddie Mitchell s'en sort plutôt bien ! On retrouve dans les seconds rôles les habitués de Mocky ainsi qu'un jeune premier Laurent Malet que Mocky n'aimait pas beaucoup. Il lui a fait porter une minerve pendant tout le film créant ainsi un personnage à la hauteur des autres.
Le film profite d'une carrière tout à fait singulière. Lors de sa sortie, la fédération de football a littéralement agressé Mocky ! Par ailleurs, ce film ne fonctionne que très moyennement auprès du spectateur dans un premier temps du moins. En effet, la tragédie de Hillsborough a lieu quelques années plus tard : 96 morts ! Mocky est alors vu comme un prophète ! Son film est ressorti et vu comme précurseur.
Il n'est pas précurseur ! Il a été représentatif de ce qui se passe, de la réalité ! Le seul (en tout cas le premier) à nous avoir mis le nez dans notre bêtise !
La bêtise humaine, on la voit lors de chaque coupe du monde ! Le mondial 2018 n'est pas loin et, ne participant pas personnellement à l'euphorie générale, j'ai pu observer en regard extérieur ce qui se passait... Cela fait réellement peur ! C'est le retour à l'animalité de l'homme. Je parle d'amis dans la vie de tous les jours que je n'ai simplement pas reconnus...
Les « fans » de la coupe du monde sont-ils animés par l'esprit sportif ? La réponse est « non ».
Définition de « l'esprit sportif » : « concept qui recouvre à la fois le respect de l'adversaire, des règles, des décisions de l'arbitre, du public et de l'esprit du jeu, mais aussi la loyauté, la maîtrise de soi et la dignité dans la victoire comme dans la défaite. »
Lors de chaque mondial, nous en avons la preuve, aucun esprit sportif n'anime les supporteurs.
Sont-ils animés par du patriotisme ?
Il est scandaleux de dire ou de croire cela ! Animé de patriotisme sous prétexte que l'on soutienne de près ou de loin son équipe nationale, laissez-moi rire...
Lors du mondial de 2018, j'ai assisté à une scène qui m'a beaucoup choqué...
Une voiture de couleur bleue se gare dans le centre-ville de Liège, un groupe vient accoster le conducteur pour lui dire de dégager sinon ils repeindront sa voiture de son propre sang jusqu'à ce que celle-ci devienne rouge (couleur de la Belgique).
Cette euphorie autour du mondial, c'est le retour au côté animal de l'homme. Le seul jour où la bêtise humaine est saluée ou félicitée.
Si ce genre de réflexion symbolise la Belgique, alors je ne suis pas fier d'être belge et ... je ne suis pas « patriote ».
Une date historique, dit-on, que ce 10/07/2018. Jour où la Belgique rencontre la France pour une demi-finale. Je serais étonné de voir combien de temps tiendrait une voiture stationnant qui arborerait les couleurs de la France en Belgique à cette date.
L'esprit sportif est encore réellement remis en question : le propriétaire de la voiture appréciant sans doute simplement l'équipe française pour des raisons valables risque pourtant jusqu'à sa vie... (si certains pensent que j'exagère, je les défie de tenir un drapeau français en Belgique lors d'une date similaire à ce 10/07/2018).
Que reste-t-il finalement de cette coupe du monde à part un phénomène de masse populaire, une immense pompe à fric à l'instar de ce que peuvent représenter des films comme ce que sont devenus les Marvel d'aujourd'hui, les « Hobbit », les « Star-wars » etc... ?
Le pire dans tout ça, c'est nous ...
Il est en effet déplorable que ces événements soient les rares qui rassemblent les gens de nos jours alors que tant d'autres font valoir de réelles valeurs ou de réels enjeux mais n'attirent l'attention que d'une poignée d'entre nous. Nos attentes sont poussées par les médias vers des émissions ridicules, des films dénués de toute recherche également surévalués par ce même phénomène de masse.
Les joueurs, réalisateurs, organisateurs de ces spectacles à sensations ne sont pas à blâmer, au contraire, ils gagnent de l'argent, beaucoup d'argent, notre argent... pour nous servir... de la merde.
Ces « artistes » sont loin d'être cons... mais alors... Où les cons se trouvent-ils ?
Une fois le match du 10/07/2018 perdu, les belges se sont empressés de crier « à mort l'arbitre », ou « les Français ont payé l'arbitre », phrases que les Français auraient sans doute prononcées également si le sort du match eût été en leur défaveur, démontrant une nouvelle fois le bel esprit sportif qui anime les foules lors de cet événement !
Ensuite plusieurs Belges ont posté un article daté d'avant le match qui dévoilait la défaite belge avant même qu'ils ne commencent à jouer. Match truqué, les supporteurs sont convaincus de ce constat mais pourtant seront toujours attentifs à ce genre d'événements à l'avenir.
Revenons sur le film qui véhicule à merveille ces idées. Le tournage ne se passe pas très bien car Serrault et Mitchell ne s'entendaient absolument pas, Serrault ne trouvait pas Mitchell professionnel, de plus Mitchell aimait bien le whisky et en a un petit peu abusé lors du tournage.
Beaucoup de conflits mais, pourtant, ces deux acteurs deviendront amis par la suite.
Le film aura reçu beaucoup de reconnaissance mais bien plus tard ! Notamment en ce qui concerne Mitchell qui de prime abord n'aimait pas le film mais qui en parle maintenant comme étant l'un de ses plus beaux rôles ! Reconnaissance également de la fédération du football qui enverra une lettre à Mocky pour s'excuser en disant « Vous aviez raison ».
Le film se présente comme un thriller à la française, un thriller stressant ! Des scènes dans un immeuble fabuleux qui sera utilisé par Terry Gilliam par après... Cette scène où Mitchell et sa femme doivent passer d'un immeuble à l'autre fout carrément le vertige !
Les séquences dans le supermarché font fort penser au chef-d'oeuvre horrifique « Zombie » de George A. Romero. Le parralèle fait froid dans le dos car ce que je compare aux zombies de Roméro, ce sont les hommes de Mocky ! Et les hommes de Mocky, je les reconnais toujours actuellement en sortant dans les rues pendant un mondial ! « A mort l'arbitre » reste le film le plus intéressant, le plus abouti de la carrière du cinéaste malgré tout ce qu'on peut reprocher à l'oeuvre !