"Il existe une multitude de cauchemars différents, propres à chacun d’entre nous. Les univers sombres, profonds, tropicaux ou gothiques en général me captivent. J’aime prendre des images de mes cauchemars et les redéfinir, les remodeler, les rendre belles. Cela a pour moi un effet guérissant."
Les images confectionnées pour ce film ont été conçues comme des peintures. Agustina San Martín et son équipe les ont patiemment élaborées, travaillant entre photographie et effets visuels pour obtenir l’atmosphère exacte qu'ils souhaitaient. La cinéaste précise :
"Ces espaces étranges qui paraissent oniriques, tout droit sortis d’un cauchemar, mais qui semblent aussi bien être des éléments ordinaires de ce monde. Entremêler le réel et l’imaginaire est l’une des clés pour moi. Rien n’est véritablement réel, rien n’est véritablement imaginaire."
Le film est construit sur une narration ouverte, où le spectateur entre dans l’esprit d’Emilia. Cette dernière possède une approche très personnelle de tout ce qui se passe autour d’elle. Agustina San Martín explique :
"De ce point de vue-là, féminin et l’horreuront essentiels à ce film. On inculque aux petites filles qu’elles sont sans défense, qu’elles sont en insécurité dans la rue, dans une fête, ou même à la maison."
"C’est pour cela que j’ai toujours tenu à raconter des histoires où les protagonistes féminines apprennent leur propre force."
"Cela s’avère être une instance fascinante où le passage à l’âge adulte et la réalisation de sa propre puissance vont de pair. Je crois que c’est une petite épiphanie que connaissent beaucoup de jeunes filles."
Agustina San Martín aime à croire que le film est un exorcisme que fait le personnage principal. Dans sa quête, Emilia devra ainsi se regarder en face pour affronter ce qu’elle a besoin d’affronter. "En pleine quête intérieure, elle tombe amoureuse d’une fille. Sans le moindre mélodrame entre elle, sans explication inutile, ce simple lien humain lui révèle sa propre puissance", précise la réalisatrice.
L’histoire se déroule dans une bourgade de la province de Misiones au nord-est de l’Argentine. En Amérique latine, la plupart des mythes sont basés sur des figures masculines qui violent ("corrigent") les filles qui désobéissent aux règles ou à leur père. Agustina San Martín note :
"De ce point de vue-là, la représentation du village et des habitants va dans ce sens. Ils croient tous qu’il y a une bête qui serait le fantôme d’un homme maléfique. L’image de cette menace masculine est constante."
"La religion tient une part importante, les églises régissent la ville tout en écoutant de la musique électronique grégorienne (composée spécialement pour le film)."
"Tout cela façonne le caractère de la ville, qui recherche une bête, persuadée que c’est une figure démoniaque. Pourtant, les « hommes malfaisants » ne sont ni des démons, ni des monstres. Ce sont les fils en parfaite santé d’une société dérangée."