On ne voit décidément pas tous les mêmes choses. Là où la critique presse a vu un "éblouissant" film féministe, et applaudi des deux mains un désir d'émancipation, de libération du patriarcat dans le personnage féminin de Banel, moi j'y ai juste vu de l'égoïsme et un terrible manque de solidarité. Ce que les critiques appellent "patriarcat" est tout simplement la vie dure d'un petit village africain, où il faut se serrer les coudes, où les règles ancestrales, sans doute dépassées, sont malgré tout, faute de mieux, nécessaires à la cohésion et à la survie du groupe. Il n'est pas temps de penser à soi quand la famille est en danger. Dans ce film, les femmes n'ont pas vraiment leur mot à dire, certes, mais la conditions des hommes n'est pas forcément très enviable (travail aux champs, responsabilités écrasantes. Les rôles sont distribués et cette société, qui n'est pas idéale, OK, est bon an mal an stable. Banel voudrait vivre sa vie à elle, avec son mari, et s'affranchir de la loi commune et des coutumes. Le reste ne l'intéresse pas. Que son village et les siens souffrent, que la sécheresse, le manque de pluie mette en péril les cultures et tue les vaches l'indiffèrent.
Son mari, d'abord comme elle, aspirant à une certaine liberté, finalement renoncera en comprenant que son devoir est d'être là, parmi les siens, et endossera les responsabilités dont il voulait lui aussi, comme elle, s'affranchir. Sa prise de conscience est belle, émouvante, et elle est tout sauf une abdication ou une résignation : c'est de la maturité, de la sagesse.
Elle, aveuglée comme une ado dans ses rêves infantiles, semble ne rien voir, ne rien comprendre au drame qui se noue autour d'elle. Murée dans son égoïsme, elle en finit par être antipathique. Pour moi, le féminisme, ce n'est pas ça.
La vie du village est magnifiquement filmée. Les images sont absolument superbes.