Malgré sa brève existence, le Zillion, pharaonique boîte de nuit anversoise, aura marqué les esprits par la démesure des soirées qui s’y déroulaient et, a posteriori, pour le cocktail de violences, de sexe et de trafics louches qui se déroulaient en coulisses et autour de la personne de son fondateur et directeur Frank Verstraeten, aka DJ Fou. Le film de Robin Pront s’attèle surtout à recréer l’atmosphère surchauffée des soirées du Zillion à la fin des années 90. Pour le personnage de Verstraeten, parti de rien et parvenu à la gloire régionale et la richesse en se montrant peu regardant sur la légalité, le modèle était tout trouvé : monter (trop) haut et s’écraser en flammes, c’est le schéma typique des films de Scorcese, de ‘Casino’ au ‘Loup de Wall street’ (auxquels il faut ajouter de petites touches de Tarantino, que Pront s’efforce également d’émuler). Reste que dans les films de Marty, il y a toujours une dimension morale, un dilemme, une lutte intérieure chez les personnages, qui leur apporte sens de la grandeur et du tragique. D’un bout à l’autre de son parcours, Verstraeten reste un plouc, brutal, égotiste et obsédé par le fric, tout au plus complexé par sa taille et sa dégaine d’informaticien. La preuve, le véritable Verstraeten s’est montré ravi de son avatar de cinéma ! En tout cas, si ‘Zillion’ s’efforce d’imiter de grands modèles américains sans doute inatteignables (alors que Pront possède d'authentiques qualités personnelles quand il reste lui-même, comme avec ‘D’Ardennen’) et souffre en fin de compte de sa trop grande fascination pour son sujet, qui le rend tapageur et vulgaire, l’ambition et l’énergie qu’il déploie pour mettre en scène un sujet malgré tout vlamingo-flamand s’avère sans commune mesure avec ce qui se fait au sud de la frontière linguistique.