Marine Barnérias fait avec Rosy ses premiers pas au cinéma. Atteinte d’une sclérose en plaques, elle décide d’entreprendre un long voyage à travers trois pays, qu’elle immortalise en filmant avec son iPhone. « Jamais je n’avais envisagé dans ma tête ou mon cœur, de faire un film... […] honnêtement, au début, rien ne me destinait à me retrouver avec ce film sur les écrans, bien au contraire... », précise-t-elle. Elle ajoute : « Mes plans étaient flous, mon téléphone était tout le temps à l’envers ! En fait, ce sont les éléments qui m’entouraient qui ont fait la qualité de mes images, pas moi... » De retour chez elle avec toutes ces images, elle a même eu envie de repartir avec une vraie caméra pour tourner de beaux plans, avant de finalement conserver les prises de vues initiales, imparfaites mais sincères.
Marine Barnérias a choisi de traverser la Nouvelle-Zélande après avoir envisagé l’Australie, « trop vaste », les États-Unis qui ne l’inspiraient pas et l’Europe qui lui semblait trop proche. Quant à la Birmanie, c’était pour « me confronter à mon esprit et au silence, qui n’est pas la première de mes qualités ! Je voulais essayer de me canaliser ». Enfin, la Mongolie « me ramenait à mes années d’équitation dans ma jeunesse et j’y voyais la symbiose parfaite entre un corps qui s’exprime et l’immensité silencieuse que vous imposent les paysages ».
Rosy est le nom qu’a donné Marine Barnérias à sa maladie. Alors qu’elle prenait des notes dans son carnet durant le voyage, elle en a eu assez d’écrire "sclérose en plaque" : « le mot "sclérose" est tellement moche ! De "sclérose" est sorti "rose" puis "Rosy"... J’ai décidé de voir de quelle manière j’allais pouvoir cohabiter avec elle au quotidien. Si j’étais un peu fleur bleue, je dirais qu’une rose à laquelle vous ne faites pas attention peut vous faire mal, vous piquer. En revanche, si vous l’observez, vous verrez qu’elle est belle, délicate... »
Marine Barnérias est revenue avec 28h de rushes à l’issue de 9 mois de voyage : « Contrairement à ce qu’on peut imaginer, je n’avais pas beaucoup d’images ! » Elle a même envisagé de repartir pour emmagasiner plus d’images. Finalement, elle a décidé de relever le défi de monter un film à partir des prises de vues initiales, accompagnée par la monteuse Anne-Sophie Bion, qui a notamment collaboré à The Artist et avec Cédric Klapisch. Bion était à l’époque occupée sur un autre film et Barnérias a dû patienter 6 mois avant de pouvoir travailler avec elle : « C’est là que le film a véritablement pris vie, sur le banc de montage… Avec le recul, je sais que Rosy est une œuvre de co-construction ! Vous savez sur ce projet, nous avons tous vécu un voyage à notre échelle, chacun s’y est investi à 100%. »
Marine Barnérias avait déjà relaté son parcours dans un livre, Seper Hero, publié en 2017. Elle avait reçu des dizaines de propositions pour adapter son récit à l’écran mais aucune ne la satisfaisait. Elle a alors décidé de monter sa propre boîte de production, Mooji Smile Productions (Moodji étant le nom de ce mongol rencontré à la fin de son voyage). Elle a fini par faire la connaissance de Harry Tordjman, après avoir vu le documentaire A voix haute qu’il avait produit.
La réalisatrice recherchait une ambiance musicale proche de celle de Mathias Piano Man, un pianiste qu’elle avait croisé lors de son étape en Nouvelle-Zélande : « Il compose des mélodies assez mélancoliques qui, à mon avis, correspondaient bien à ce que devait dégager mon film ». C’est le producteur Harry Tordjman qui a proposé de contacter Matthieu Chédid pour la bande originale de Rosy. « J’avais cependant de gros doutes sur le fait qu’il soit touché par mon film : lui qui aime la poésie, les mots, les sensations, j’étais persuadée qu’il allait être rebuté par le côté brut de Rosy... », se souvient Marine Barnérias. Finalement, l’entente a été immédiate. « Pour travailler, il est parti dans un hôtel du Mont-Saint-Michel et m’a vite envoyé un message vocal dans lequel il jouait quelques notes à la guitare accompagnées d’un sifflement... J’ai appelé Matthieu immédiatement en lui disant « Ça y est, on a le thème du film » ! »