C’est en mêlant ses envies de comédie, de paysages et de huis-clos que Didier Barcelo a donné naissance à En roue libre, son premier long-métrage : « l’idée d’un huis-clos en mouvement, un personnage en voiture qui ne comprend pas bien ce qui lui arrive mais qui va découvrir que sa vie ne ressemble pas à grand-chose. » Cela résonnait avec des crises de milieu de vie que traversaient certains de ses amis. Alors qu’il pensait avoir imaginé la pathologie dont souffre le personnage de Louise, il a appris par une amie, chef de service dans un hôpital psychiatrique, qu’un cas similaire avait bien existé, « mais moins longtemps, quelques heures seulement. Elle s’était garée sur le bord de la route, sur le chemin de son travail, elle n’arrivait pas à en sortir. Il se trouve qu’elle subissait un harcèlement dans sa vie professionnelle. »
Le réalisateur a décidé de confronter le personnage de Louise à celui de Paul, qui n’a a priori rien à voir avec elle : « Un autre personnage pouvait la faire évoluer, l’aider à résoudre sa situation. Lui-même aurait sa propre problématique qu’elle aiderait à résoudre. Une suite de rencontres, même cocasses, ne suffisait pas. » La différence d’âge s’est imposée rapidement afin d’évacuer l’idée d’une histoire d’amour.
Benjamin Voisin a été casté pour le rôle de Louis alors qu’il n’avait pas encore tourné Été 85 de François Ozon, qui lui a valu le César du meilleur espoir masculin. Le réalisateur se souvient : « Pour ce rôle-là, on a vu beaucoup de bons acteurs de cet âge-là. Mais au moment où j’ai vu Benjamin devant la caméra, quelque chose s’est passé. C’est amusant, ce sont des choses que je lisais dans les interviews de réalisateurs et auxquelles je ne croyais pas. Mais là, il y a eu comme une évidence. Benjamin me fait penser à une sorte de Belmondo jeune, il a lui aussi quelque chose de très naturel. »
Le choix de la voiture était très important, puisqu’il s’agit du troisième personnage du film. « Par souci de réalisme, j’ai d’abord pensé à une petite voiture : une infirmière en province circulerait plutôt dans une Twingo ou une Clio que dans une Volvo. Mais je me suis dit aussitôt que je n’avais aucune envie de tourner à l’intérieur d’une Twingo… Alors, cherchons une belle voiture, une voiture assez grande, vintage, photogénique et pas chère, en l’occurrence une Volvo 240 break. On avait écrit que c’était la voiture de son père », explique Didier Barcelo. Le véhicule a été repeint en couleur moutarde et l’intérieur (la couleur des sièges, les matières, la couleur du plafond) a été complètement refait.
L’équipe ne pouvait pas filmer en faisant réellement rouler la voiture car le moteur aurait été trop bruyant et il aurait fallu post-synchroniser tout le son. Il n’était pas non plus question d’utiliser une « camera car », c’est-à-dire poser la voiture sur une plateforme car selon le réalisateur, « ce ne sont pas des conditions idéales, on est loin des comédiens, etc. » Finalement, tous les intérieurs dialogués ont été faits en studio, avec une technique de mur LED.