Soi Cheang a découvert le roman The Wisdom Tooth de Lei Mi en 2015. Il se rappelle : "J’ai essayé de le monter en Chine continentale, en tant que projet continental, mais j’ai eu beaucoup de difficulté à le développer. Je l’ai donc mis de côté, et il y a environ quatre ans, j’ai décidé de revenir à Hong Kong et de réaliser un film à plus petite échelle. C’est à ce moment-là que les deux choses se sont rejointes et que j’ai donné le roman à mon scénariste Au Kin-yee pour qu’il l’adapte et le situe à Hong Kong."
Soi Cheang avait déjà tourné plusieurs de ses films à Hong Kong. Le réalisateur explique ce qui lui a redonné envie de poser sa caméra dans cette ville : "Je n’ai jamais quitté le marché hongkongais ; je veux toujours faire des films à Hong Kong, mais ces dernières années, j’étais occupé à tourner la série de films The Monkey King en Chine. Ce sont des films à plus grande échelle et au bout d’un moment, c’est devenu un peu lassant. C’est pourquoi je voulais revenir à Hong Kong, pour produire un film à une échelle différente, plus petite, pour changer. Le tournage de Limbo m’a rappelé pourquoi je voulais faire des films."
Les rues réelles de Hong Kong ne sont pas aussi sales qu’elles apparaissent dans le film. Les deux principaux collaborateurs qui ont travaillé avec Soi Cheang sont le directeur artistique Kwok-Keung Mak et le directeur de la photographie Siu-Keung Cheng. Le cinéaste précise :
"Ils ont participé à l’habillage de ce décor, et chaque jour avant le tournage, nous passions en revue et discutions à nouveau de l’emplacement exact des éléments du décor pour nous assurer qu’ils apparaissent comme il le fallait. On peut dire que l’idée de ce côté crasseux de la ville vient d’abord de mes souvenirs, mais bien sûr, dans le film, leur représentation est un peu exagérée, parce que je voulais vraiment mettre en lumière cette facette de Hong Kong. D’une certaine manière, c’est à la fois réel et fictif."
Né aux États-Unis en 1990, Mason Lee (interprète de l'inspecteur Will Ren dans Limbo) est le fils du réalisateur taïwanais Ang Lee. Il est principalement connu pour son rôle dans Very Bad Trip 2. Il joue par la suite dans de nombreux films et séries de langue chinoise, qui lui valent d’être nommé à plusieurs reprises aux Golden Bell Awards et aux Golden Horse Awards.
Limbo a été présenté dans les festivals suivants :
-L’Étrange Festival 2021 – Compétition
-Festival International du Film Fantastique de Catalogne 2021 – Prix de la photographie
-Hong Kong Film Awards 2022 – Meilleur scénario, Meilleure actrice, Meilleure photographie, Meilleurs décors
-Reims Polar 2023 – Grand prix du jury et Prix de la critique
-Hallucinations Collectives 2023 – Grand prix et Prix du jury
Après s’être engagée dans le projet, la comédienne Cya Liu a lu le roman. Elle campe dans le film le personnage de la jeune délinquante utilisée par les policiers pour leur enquête. Un rôle difficile et très physique comme l'explique Soi Cheang : "Elle se sentait prête, elle savait ce qu’allait lui demander ce personnage. En tant que réalisateur, je n’ai donc pas eu besoin d’avoir de longues et profondes discussions avec elle. Il s’agissait plutôt de savoir ce qu’elle était prête à jouer."
"Je devais préparer le plateau pour faire en sorte qu’elle ressente l’instant présent, ce qui permettait de la stimuler pour qu’elle soit la plus convaincante possible dans son interprétation. Pour être un peu moins abstrait, si par exemple son personnage doit être attaqué par des gens, je veux m’assurer que les acteurs qui l’entourent ne se contentent pas de faire semblant. Ils doivent vraiment mettre de l’énergie ou de la force dans leur interprétation, pour qu’elle ressente cette menace."
"Cela l’aide à canaliser son interprétation et ses émotions pour jouer ce qu’elle veut. Mon travail consistait donc à m’assurer que tous les éléments autour d’elle sur le plateau étaient prêts à lui donner le sentiment dont elle avait besoin."
Le film se centre sur une histoire de tueur en série dans le milieu des sans-abris et des toxicomanes. Soi Cheang confie : "On peut dire que je m'identifie à ces personnes, ces marginaux, parce qu’ils font partie des souvenirs de mon enfance dans ces quartiers. Mon père, par exemple, se rend encore souvent à Sham Shui Po, que j’ai mentionné plus tôt, l’un des quartiers pauvres de Hong Kong. Je me souviens qu’un jour, alors que je m’y rendais pour des repérages, j’ai vu mon père, traînant avec d’autres personnes ; des gens que vous pouvez voir dans Limbo, par exemple. Ils ont des histoires que nous ne connaissons pas et je m'identifie à eux. Je pense donc qu’ils ont naturellement leur place dans mes films."