Un film étonnant, dont on ne sait pendant longtemps où il veut nous emmener, oscillant entre le psychologique, et le fantastique, bien ancré en tout cas dans la tradition anglaise, fait de non dits et des suggestions. Julie, accompagnée de sa mère âgée, vient prendre quelques jours de repos dans un hôtel perdu dans la campagne anglaise. Elle traverse une crise psychologique et veut travailler à un scénario sur la vie de sa mère, et la relation qu’elle a avec elle.
Dés le début du film, on sent que l’auteur veut nous suggérer que nous rentrons dans une dimension inconnue, quand le taxi emmenant sa cliente, s’engouffre dans l’allée forestière du château, faisant hôtel, et que le chauffeur parle de son trouble, en venant ici.
La dernière fois qu’il y est venu, dit il, une présence étrange se tenait derrière lui, avant de disparaître. Un manoir hors du temps, un brouillard a coupé au couteau, tombant sur les jardins, dés que le soir tombe. On pense au chef d’œuvre d’Henry James, « le tour d’écrou » porté au cinéma plusieurs fois, avec des bonheurs différents.
Julie a les pires difficultés à obtenir la chambre qui lui était promise, à l’étage, auprès de la jeune femme mutique, faisant fonction de standardiste.. Situation étrange, car l’hôtel semble vide. Les clés pendent au tableau. L’endroit est connu de la mère. Elle y a passé de longs moments dans sa jeunesse. L’endroit était il alors un hôtel ? Nous ne le saurons pas, même si la mère en parle souvent, de façon nostalgique, ou douloureuse, au grand dam de la fille, au fil des pièces où ils dorment et où ils mangent.. « As t’elle bien fait de venir ici, et d’inviter sa maman, dont la moindre saute d’âme la déstabilise ? »
La mère, souvent alitée et de santé fragile, semble souvent absente. Même si elle semble aimer sa fille, les efforts désespérés de celle ci pour l’impliquer dans quelque chose de fusionnel semblent liés à l’échec.
La scénario se développe sur une multitude de pistes qui semblent faire sens, avant de s’avérer des cul de sac. Qui vient chercher la jeune employée chaque soir, au volant d’une voiture ?...Quels sont ces bruits à l’étage, alors que personne n’occupe de chambre ?
Enfin un autre employé apparaît dans la nuit, alors que Julie est désespérée par la fugue de son chien, en pleine nuit. Un sexagénaire, ayant toujours été employé ici, vient l’aider. Tous deux se lancent dans les nappes du brouillard du parc immense. Le chien est retrouvé et ce soulagement de courte durée favorise un dialogue entre les deux personnes ; le vieil homme devenant étonnamment presque le thérapeute de la cinéaste, dans ce scénario surprenant, où les convenances guindées semblent parfois voler en éclat, sous l’effet des tensions.
On pense au magnifique film « les autres » de Alejandro Amenábar , avec une Nicole Kidman de plus en plus perturbée par les événements étranges survenus dans le même genre de demeure, et où elle s’apercevra, dans les dernières images, à son grand effroi, que les fantômes ne sont pas ceux qu’elle pensait être.
C’est la logique des faits, dans ce genre de film, de voir les personnages de plus en plus déstabilisés par la prédominance des lieux, qui semblent imposer leur esprit et diriger les actions.
Les images sont très léchées, fidèles à ces huit clos britanniques, où l’élégance des lieux conditionne la retenue des rapports entre les personnages.
Où sont les fantômes ? Qui est habitée dans cette maison ? Et qui produit des images, dans cette foire aux illusions, ou une fille tente de réamorcer un dialogue impossible avec une mère ? L’échec est patent.
Le fantastique anglais, tous comme les romans policiers à énigme, n’ont pas leur pareil pour construire des chausses trappes, et nous entraîner dans cette grandes battisses habitées par l’esprit, dont on se demande pendant longtemps qui est le coupable, avant de s’apercevoir qu’il n’y en a pas !
Un film que je recommande pour sa qualité, ses prises de vue, le scénario très original.