Le film a été présenté en séance spéciale au Festival de Cannes 2022.
Patricio Guzmánn, né en 1941 à Santiago du Chili, a dédié sa carrière au film documentaire. Entre 1972 et 1979, il réalise La Bataille du Chili, une trilogie de cinq heures sur le gouvernement de Salvador Allende et sa chute. Après le coup d’État de Pinochet, il est arrêté et enfermé pendant deux semaines dans le Stade National, où il est menacé à plusieurs reprises par des simulacres d’exécution. En 1973, il quitte le Chili et s’installe à Cuba, puis en Espagne et en France, mais reste très attaché à son pays et son histoire.
En octobre 2019, suite à la hausse des tarifs des transports publics à Santiago du Chili, une mobilisation massive de la population a débuté, lassée des importantes inégalités sociales qui frappent le pays. Ces manifestations ont débouché sur la déclaration de l’état d’urgence par le gouvernement chilien, d’un couvre-feu et la concession de pouvoirs extraordinaires à la police et l’armée dans la gestion de l’ordre public.
Cinquante ans après avoir réalisé La Bataille du Chili, une trilogie de cinq heures sur le gouvernement de Salvador Allende et sa chute, Patricio Guzmán a pu être le témoin d'une révolution sociale en 2019 : "Un million et demi de personnes ont manifesté pour plus de démocratie, pour une vie plus digne, une meilleure éducation et un meilleur système de santé pour tous. Le Chili avait retrouvé sa mémoire. [...] j’étais de nouveau dans la rue pour filmer ce qui se passait. J’étais là au moment où le peuple chilien a voté pour une nouvelle constitution et a obtenu une majorité de 80% en faveur d’une assemblée constituante. J’étais là quand un nouveau président de gauche de 35 ans, Gabriel Boric, a été élu avec 56% des voix. Du jamais vu dans l’histoire du pays, de mon pays imaginaire..."
Au début des manifestations, Patricio Guzmán n'était pas sur place puis le Covid l'a empêché de voyager. Mais beaucoup de ses amis chiliens filmaient ce qu'il se passait et lui envoyaient leurs vidéos. Quand la pandémie s'est calmée, il s'est rendu avec son équipe à Santiago pour filmer en deux temps les événements. Le premier tournage a duré huit semaines et le second trois. "Ce processus est très courant dans le cinéma documentaire : s’ouvrir à une réalité, la filmer, et en être partie prenante à la fois. [...] Nous avons pu choisir des personnages, des situations, des lieux, comme s’il s’agissait d’un film de fiction."