Le scénario de Fifi est fortement inspiré par des souvenirs personnels d’enfance et d’adolescence de la réalisatrice Jeanne Aslan, qui a grandi en Lorraine. Elle se rappelle : "J’avais envie de restituer l’ambiance particulière du quartier où j’ai grandi. Un quartier HLM qui n’a rien à voir avec ceux qu’on voit dans les médias. Il en existe d’ailleurs des milliers, des cités de ce genre, au fond assez tranquilles, voire désolées, et où les problèmes sont surtout d’ordre financier."
"Mais Fifi, ce n’est pas vraiment moi, et sa famille n’est pas exactement la mienne. D’ailleurs, moi, je suis d’origine turque, mais mon quotidien était celui de tous ceux qui vivaient là. Nous étions plusieurs familles avec une fratrie de six ou sept gosses, avec tout ce que ça suppose de promiscuité, de problèmes, etc. Fifi et sa famille sont au fond un mélange de nous tous."
"Je voulais, avec ce film, parler d’une jeune fille qui a grandi dans une famille chaotique et déstructurée, et qui elle-même se laisse aller, malgré des capacités évidentes. Ensuite est venue l’idée d’une rencontre avec un garçon très différent d’elle et de son milieu social, qui va lui permettre d’élargir son horizon. Il y avait cette envie de dépeindre cette adolescente particulière, et une rencontre un peu magique qui viendrait ouvrir une brèche dans son quotidien."
Le HLM devait être crédible et la maison de Stéphane ne devait pas se contenter de refléter un intérieur bourgeois : "Pour le HLM, nous avons trouvé exactement celui dans lequel on se projetait. Ça nous a beaucoup aidés, nous, dans notre mise en scène, mais aussi les comédiens ; la circulation que l’agencement des pièces suppose, quand on est nombreux, le nombre de lits par pièces, etc."
"Comme on ne voulait pas insister sur les différences de milieu, il fallait que les décors parlent d’eux-mêmes. Il fallait aussi qu’ils soient plaisants, d’une façon ou d’une autre, parce que les deux-tiers du film se passent en intérieur. Pour le décor de chez Stéphane, on voyait plutôt quelque chose d’assez moderne, d’une modernité classique type construction des années 60", notent Jeanne Aslan et Paul Saintillan.
Ils ajoutent : "On a eu la chance de trouver cette maison d’architecte, dans le style Alvar Aalto, avec beaucoup de lumière, mais aussi des demi-niveaux et une petite coursive."
L’appartement de Sophie ressemble à un labyrinthe, alors que le pavillon des parents de Stéphane est tout en lignes droites et angles droits... Jeanne Aslan et Paul Saintillan précisent : "Ce qu’on ne voit pas, c’est à quel point en HLM les plafonds sont bas, les volumes des pièces sont réduits. Alors quand une famille de neuf personnes vit dans le même appartement, ça fait énormément de bordel tout de suite. On a travaillé sur cet effet de saturation de l’espace avec notre décoratrice Marie Grosdidier, en insistant sur la pagaille, les armoires branlantes, plus que sur la présupposée laideur des lieux. Chez Stéphane, en revanche, tout est clair et lumineux, et agencé de manière harmonieuse."
"Au moment où on l’a choisie, nous n’avions pas vu Les Eblouis, et la série En thérapie n’avait pas encore été diffusée. Mais Céleste a une telle présence qu’elle s’est imposée à nous dès qu’on a vu ses essais filmés. Il n’y a pas eu la moindre hésitation. Non seulement elle correspondait au rôle, mais elle avait une proximité naturelle avec Fifi. Elle l’a incarnée avec un plaisir et une intensité qui nous ont impressionnés."
Lorsque Quentin Dolmaire a accepté le rôle, sa présence n’a cessé d’influer sur le personnage et le scénario, et d’acquérir toujours plus de profondeur. Jeanne Aslan et Paul Saintillan notent : "Le personnage de Stéphane a bénéficié de sa grande singularité et de cette voix si particulière. Dans certaines répliques, on avait parfois l’impression d’entendre Charles Denner, un acteur qu’on aime beaucoup."
"Quentin apporte une étrangeté et un charme qui arrivent à rendre n’importe quelle scène intéressante – même quand les personnages collent des timbres sur des enveloppes ! Il a aussi apporté une certaine fragilité au personnage. Enfin, Quentin comme Céleste ont en commun d’être parfois très beaux, mais pas tout le temps ! Et cette mobilité dans leur physionomie les rend passionnants à filmer et à regarder."