Avec Mon ami robot, Pablo Berger réalise son premier film animé. Il ne s'agit toutefois pas d'un souhait remontant à ses débuts, même si c’est un genre qu'il adore : "J’ai consommé beaucoup de cartoons dès ma jeunesse : les Merry Melodies, Felix le chat, Popeye, Betty Boop, et les productions d’Hanna-Barbera... La maison où je vivais côtoyait un cinéma où passaient les Disney et j’entendais le son jusque dans ma chambre."
"Le premier que j’ai vu était Blanche Neige et le sept nains... qui allait m’inspirer bien plus tard pour Blancanieves. Mais je me souviens surtout de deux séries japonaises d’Isao Takahata, Heidi, sur laquelle avait débuté Miyazaki, et Marco. Elles m’avaient marqué parce qu’elles s’élevaient au-dessus du simple film d’action et de divertissement. Elles jouaient sur l’émotion et c’est ce que j’ai voulu reproduire dans Mon ami robot."
Pablo Berger collectionne les livres sans parole. Lorsqu'il préparait Blancanieves, il est tombé amoureux d’une bande dessinée américaine de Sara Varon, Robot Dreams. Le thème - l’importance et la fragilité de l’amitié – le touchait, tout comme la fin et l’idée de raconter cette histoire avec des animaux. Le metteur en scène poursuit : "Je ne pouvais que passer à l’animation. J’aime le risque. J’ai, depuis Blancanieves, des producteurs qui me suivent et même me poussent, alors on s’est lancé..."
"De plus, ce n’était pas si éloigné de l’univers de mes films précédents : l’absence de dialogue, le fait de devoir tout faire passer par les images. Torremolinos 73 et Abracadabra sont parlants mais on y trouve des minutes entières sans dialogue. J’aime aussi les effets « montagnes russes » dans une histoire et il y en avait. J’ai aussi vu dans ce projet l’occasion d’une déclaration d’amour à New York où j’ai vécu dans les années 90 et où j’ai rencontré ma femme qui est devenue ma plus proche collaboratrice."
Dans la bande-dessinée, New York est une toile de fond. Pablo Berger a voulu en faire un personnage à part entière comme il l'explique : "C’est une des leçons que j’ai retenues des films du studio Ghibli : des personnages aux traits simples mais sur fond de décors très détaillés. Mon ami robot est, pour ma femme et moi, un film d’époque. On essayait toujours de retrouver une réalité qu’on avait vécue et dont on est nostalgiques. C’est pourquoi on y voit bien sûr les Twin Towers..."
Le film fourmille de références, dont une dès le début : l’affiche du film de Pierre Etaix, Yoyo. Pablo Berger précise : "Ça a été difficile de trouver quel poster on allait placer dans l’appartement de Dog, qui apparaît beaucoup dans le film. Je voulais une affiche de cinéma pour montrer que Dog est cinéphile, collectionne des disques, voit des films... J’ai pensé tout de suite à un film muet, même si Yoyo n’est pas entièrement muet, mais c’est aussi un film écrit avec des images."
"Pierre Etaix, renvoie aussi à Jacques Tati... et cette affiche est magnifique, ce sourire graphique qui contraste si bien avec la tristesse de Dog... On était tous convaincus, dès le début du processus de recherches Avant de commencer la production, on a réalisé un teaser de deux minutes où figurait déjà cette affiche."
Parmi les autres clins d’œil présents dans Mon ami robot, nous pouvons citer les jumelles de Shining, les trois petits cochons ou encore Le Magicien d’Oz. Pablo Berger raconte : "Avant d’être réalisateur, je suis cinéphile, donc je m’amuse et j’aime les clins d’œil, conscients ou pas. Je l’ai fait aussi dans Torremolinos 73, Blancanieves et Abracadabra. On peut voir dans Mon ami robot des new Yorkais fameux, des acteurs... Et le décor qui tombe, c’est bien sûr ce plan fabuleux de Buster Keaton dans Steamboat Bill jr., copié à la seconde près."
Pablo Berger a travaillé avec deux studios : un à Madrid, l’autre à Pampelune. Dans le but de tout superviser, les animateurs devaient venir sur place malgré le Covid, car le contact était essentiel. "Les directeurs d’animation allaient d’un studio à l’autre. Mes films précédents m’avaient bien préparé à cette discipline car pour chacun j’avais fait des story-boards très précis. J’avais travaillé un an sur celui de Blancanieves. J’aime dessiner chaque plan et je suis très patient. Heureusement, car c’est dix-huit mois minimum pour l’animation, mais pour la réalisation globale de Mon ami robot, il nous a fallu cinq ans, durant lesquels il faut surtout rester motivé...", se rappelle le metteur en scène.
Pour l’animation du projet, Pablo Berger a pu compter sur le grand artiste et directeur d’animation Benoît Feroumont. Lorsque le cinéaste a vu son dernier court métrage, Le lion et le singe, il a tout de suite pensé qu’il serait le collaborateur idéal pour Mon ami robot. Il explique : "Le lion et le singe est un merveilleux court métrage plein de tendresse, de vérité et d’humour. Et de plus, sans dialogues. Benoît a une grande expérience en tant que directeur de l’animation et il a travaillé sur des films de renoms comme Les Triplettes de Belleville de mon adoré Sylvain Chomet, ou encore Le livre de Kells de Tom Moore. Son savoir-faire et sa sensibilité ont été fondamentales pour diriger avec succès une équipe d’une soixantaine d’animateurs."