Louloute
La petite fille aux yeux tristes
C’est le 1er long-métrage d’Hubert Viel qui bénéficie d’une vraie sortie sur nos écrans. 88 minutes touchantes et souvent poétiques qui brassent sans doute un peu trop de thèmes pour être totalement abouties. Années 80, Normandie. Entre les vaches, le Club Do' et les gros pulls en laine, Louloute rêve, tombe amoureuse et se dispute avec ses proches. Alors que la ferme familiale s'endette, sa vie va changer à jamais. Des défauts dues au désir de trop bien faire, de trop en faire, qui nuisent à l’ensemble de ce joli film pour tout public, mais qui hélas sort au cœur de l’été et qui risque fort d’être délaissé. A voir et à soutenir.
Au départ, il s’agissait d’un récit plus léger, sur les rêveries d’une petite fille, sans l’évocation de la précarité du monde agricole. Mais les producteurs trouvaient le projet trop abstrait et manquant d’un ancrage dans le réel. Pour faire tenir le tout : il a donc ajouté la crise laitière, la tragédie familiale, les années 80, la narration en flashback avec le dédoublement de l’héroïne. Cette espèce de conte naturaliste est un peu déroutant dans sa construction. Personnellement, je me serai bien passé de la double temporalité. Je ne suis pas bien sûr que la partie actuelle apporte grand-chose de plus au propos. Bien au contraire, elle le dilue. On sent que le personnage de Louloute adulte n’est là que pour permettre de raconter l’histoire au passé. D’ailleurs, le film se conclut sur un sentiment de nostalgie à l’état pur… une très belle idée. Entre poésie du terroir et comédie douce-amère, le film permet la découverte d’une jeune actrice dont le regard ne peut laisser personne indifférent.
Ce qui vaut le détour avant tout, c’est la jeune Alice Henri, qui pour son 1er rôle, est époustouflante. Les parents, Laure Calamy – comme toujours parfaite de naturel - et Bruno Clairefond, - qu’on avait plus vu à l’écran depuis 2016 ??? -, sont d’une justesse remarquable. Une mention pour Erika Sainte, qui campe notre Louloute adulte et Olivier Saladin, parfait en grand-père déjanté. Un film discret, sensible, qui refuse le clinquant et donc d’une justesse extrême. Une belle chronique sur le malaise des agriculteurs, mais vue à travers le regard – tellement expressif -, d’une petite fille. Touchant !