Le film a été présenté en compétition au Festival de Cannes 2022.
Dans Les Amandiers, Valeria Bruni Tedeschi s'est nourrie de son expérience à l'École des Amandiers de Nanterre de Pierre Romans et Patrice Chéreau où elle s'est formée dans sa jeunesse et où elle a côtoyé notamment Agnès Jaoui, Vincent Perez, Marianne Denicourt et Bernard Nissille. Elle a utilisé ses souvenirs et ceux des anciens élèves qu'elle a retravaillés et fictionnés : "Je les ai recontactés un à un, on s’est retrouvé. Ça a été joyeux, j’avais l’impression étrange que le temps n’était pas passé. Ils savaient que le film serait de la fiction, qu’on allait modifier la réalité et que leurs noms n’apparaîtraient pas. Ils ont été tous très généreux dans leurs témoignages."
C'est Thierry de Peretti, réalisateur d'Une Vie Violente et d'Enquête sur un scandale d'état, qui a donné à Valeria Bruni Tedeschi l'idée des Amandiers, comme elle le raconte : "C’est un grand cadeau une idée de film. Quand j’en ai parlé à Agnès [De Sacy] et à Noémie [Lvovsky], c’était comme l’œuf de Colomb, une évidence. Cette école a été fondatrice pour moi, dans mon travail et dans ma vie." De Peretti et Bruni Tedeschi se sont donnés la réplique dans Ceux qui m'aiment prendront le train et Saint Laurent, et le premier a dirigé la seconde dans Enquête sur un scandale d'état.
L'une des séquences du film se déroule à New York, où la troupe des Amandiers découvre l'Actor's Studio et la méthode de Lee Strasberg. Valeria Bruni Tedeschi se souvient : "Chéreau nous a envoyé tout de suite, au tout début de l’école, là où se trouvait la modernité du jeu à cette époque : en Amérique, où était née, quelques années avant, la méthode de Lee Strasberg. La méthode de Strasberg a été pour moi comme une fenêtre qu’on ouvrait sur l’horizon, elle a été décisive dans mon travail d’actrice."
Sandra Nkaké joue d'ailleurs un personnage inspiré de Susan Batson, l’une des grandes coaches de l’Institut Strasberg, que Bruni Tedeschi a rencontrée là-bas et avec laquelle elle a travaillé tout au long de sa carrière. La réalisatrice et actrice souligne que la manière de diriger de Chéreau était plus "masculine" et "brutale" que celle de Strasberg, "Mais ils visaient, Chéreau et Strasberg, le même but : la vérité. Il m’est difficile de résumer la manière de diriger de Chéreau, disons qu’il réfléchissait, il pensait, il travaillait beaucoup, beaucoup d’heures..."
Si les noms des comédiens de la troupe des Amandiers ont été modifiés, les noms de Patrice Chéreau et Pierre Romans ont été conservés. "Même si Pierre Romans est moins connu, Chéreau et Romans sont entrés dans la légende et dans l’inconscient collectif, et on n’a pas voulu renoncer à cette légende", explique Valeria Bruni Tedeschi. Redonner vie à Chéreau était impressionnant pour la réalisatrice, qui a puisé dans les interviews, les notes et les lettres du cinéaste et metteur en scène, ainsi que dans le spectacle que Pascal Greggory lui a consacré : "On a essayé de s’approcher de la précision et de l’intelligence de Patrice en utilisant ses propos parfois au mot près. Bref, au départ, ce personnage était sérieux, travailleur, assez intéressant, mais un peu théorique, lisse. Il a fallu le rendre plus anguleux, lui chercher des aspérités."
Le personnage d'Étienne est inspiré de l'acteur Thierry Ravel, décédé en 1991 à l'âge de 28 ans des suites d'une overdose. Il était notamment apparu dans Hôtel de France de Patrice Chéreau, Descente aux enfers, aux côtés de Sophie Marceau et Claude Brasseur, ainsi que le clip Mon mec à moi de Patricia Kaas. Valeria Bruni Tedeschi, qui a été sa compagne, lui avait rendu hommage dans le numéro 51 (juin 1991) de Studio Magazine : "Ton talent d'acteur et ton charisme naturel nous portaient tous à croire qu'un jour tu goûterais aux délices et aux pièges du succès. Tu fonçais dans la vie comme un enfant qui ne se doute pas du danger. Alternant un sourire moqueur et tendre à la rage et à la révolte, tu désarmais. Tu déroutais. Réussir ne t'a jamais servi comme prétexte à l'hypocrisie."
Il a été question, un court instant, que le metteur en scène devienne une metteuse en scène et que Valeria Bruni Tedeschi incarne Patrice Chéreau. Finalement, cette dernière a confié le rôle à son ancien compagnon, Louis Garrel, qu'elle avait déjà dirigé dans Actrices et Un Château en Italie. "Je ne voudrais pas parler à sa place, mais je pense que Louis, sans l’avoir beaucoup croisé, avait un rapport intime et secret très important avec Chéreau, et la proposition de ce rôle l’a tout de suite fait vibrer. Il a fait sa cuisine, et je l’ai laissé libre." La réalisatrice et l'acteur n'ont eu qu'un point de discorde : les petits cigares que fumait Chéreau ! Garrel ne voulait pas se remettre à fumer pour le film mais a finalement cédé.
Pour trouver les jeunes interprètes de la troupe des Amandiers, la réalisatrice a cherché avant tout des personnalités et un groupe cohérent : "J’avais l’impression d’avoir à former un orchestre. Les essais ont été très longs pour tout le monde, j’essayais parfois une actrice dans deux ou trois rôles différents, on essayait des couples, je les faisais tourner, garçon-fille, garçon-garçon, fille-fille, Sofiane et Noham, Nadia et Clara, Nadia et Vassili, etc."
Nadia Tereszkiewicz joue Stella, inspirée de Valeria Bruni Tedeschi. Les deux actrices s'étaient données la réplique dans Seules les bêtes, où elles étaient amantes. La réalisatrice pensait d'abord qu'elle était trop âgée pour le rôle avant de se raviser : "Elle a beaucoup travaillé, vu des films, des documentaires, lu des textes, répété avec moi et les autres, mais elle a fait aussi sa propre cuisine personnelle et secrète dont je n’étais pas courant."
Avec Les Amandiers, Sofiane Bennacer décroche son premier grand rôle au cinéma. C'est le comédien Stanislas Nordey qui a conseillé le jeune acteur à Valeria Bruni Tedeschi, qui a été impressionnée par son audition par vidéo : "Il avait glissé imperceptiblement de ses propres mots à un texte de Koltès sans qu’on s’en rende compte. La langue de Koltès lui était étrangement familière. Il avait une précision et une profondeur vraiment impressionnantes. J’ai tout de suite pensé qu’il avait une envergure, le charisme et la dimension d’un grand acteur."
L'une des pus grandes inspirations de la réalisatrice a été Panique à Needle Park de Jerry Schatzberg. Elle a d'ailleurs organisé une projection du film à l'équipe durant les répétitions pour montrer aux jeunes acteurs et actrices "la vérité de jeu d’Al Pacino et Kitty Winn. Je voulais aussi leur montrer ce monde, cette époque, cette jeunesse. Et je voulais faire comprendre plus particulièrement à Nadia et à Sofiane le lien entre l’amour et la drogue. La drogue est comme une troisième personne dans une relation amoureuse."
La candidate refoulée qui travaille à la cafétéria et qui est incarnée par Suzanne Lindon a été totalement inventée par Valeria Bruni Tedeschi : "Je l’ai imaginé très tard, juste avant le tournage. Il me manquait quelque chose, le film avait besoin d’un personnage de perdant. Un ami réalisateur, Yann Coridian, m’a donné l’idée que le personnage travaille à la cafétéria du théâtre." Ce personnage lui a permis de raconter le regard extérieur que les gens de l’époque avaient sur le théâtre des Amandiers.
Le personnage de Franck, interprété par Noham Edje, renvoie à Franck Demules. Son parcours, fait d'addictions et d'alcoolisme, fut mouvementé. Son épouse, l'actrice Isabelle Ho, vue dans Martin et Léa d'Alain Cavalier et Mortelle Randonnée de Claude Miller, est décédée des suites des complications dues au virus du sida en 1991. Demules est devenu au début des années 2000 le chauffeur puis l'assistant de la soeur de Valeria Bruni Tedeschi, Carla Bruni Sarkozy. En 2009, toujours au service de celle qui était alors Première dame de France, il publie le livre Un petit tour en enfer, où il revient sur les épreuves qu'il a traversées. Il raconte notamment comment il a été abusé sexuellement de ses 10 à 18 ans par son tuteur, Christian Hennion, alors journaliste à Libération.
Dans Les Amandiers, on peut voir Patrice Chéreau et sa troupe monter la pièce Platonov de Tchekhov. La réalité a dépassé la fiction puisque le cinéaste et metteur en scène a adapté cette pièce au cinéma en 1987 avec ses comédiens dans Hôtel de France. Un documentaire sur les coulisses de ce tournage, intitulé Il était une fois dix-neuf acteurs, a été réalisé par François Manceaux la même année. Enfin, un documentaire intitulé Des Amandiers aux Amandiers et diffusé sur Arte revient sur les coulisses du tournage du film de Valeria Bruni Tedeschi. Il est signé Stéphane Milon et Karine Silla Perez, compagne de Vincent Perez, ancien membre de la troupe des Amandiers.
Le 22 novembre 2022, Le Parisien annonce que le comédien Sofiane Bennacer, premier rôle masculin des Amandiers, a été mis en examen en octobre par une juge d’instruction de Mulhouse à la suite d’accusations de quatre ex-compagnes dont des comédiennes. Présélectionné par l'Académie des Césars pour figurer parmi les Révélations de l'année, l'acteur, qui réfute ces accusations, est exclu de la liste.
Le 25 novembre, c'est Libération qui dévoile une nouvelle enquête, élaborée pendant 8 mois, en recueillant la parole de deux nouvelles victimes. Le papier affirme également que la production a décidé de maintenir le tournage tout en ayant connaissance des plaintes déposées contre l'acteur. Dans un communiqué, Valeria Bruni Tedeschi dénonce le traitement médiatique de l'affaire au nom de la présomption d'innocence et affirme son soutien au comédien qui est par ailleurs son compagnon à la ville. Plusieurs cinémas décident de déprogrammer le film ou d'en encadrer les projections par des débats.
Le distributeur du film, Ad Vitam, a pris l'initiative d'adresser un courrier aux exploitants de cinéma, dont voici un extrait : "Les Amandiers est une œuvre collective. [...] Il nous semblerait normal que ce film puisse poursuivre sa vie en salles. Mais sachez que face à cette situation, nous comprenons et respectons toutes les positions et décisions que vous prendrez quant à l’exploitation du film dans votre salle. Cette décision appartient à chacun d’entre vous."