Le film a été présenté à la Quinzaine des Réalisateurs au Festival de Cannes 2022.
Le Serment de Pamfir est le premier long-métrage de fiction de Dmytro Sukholytkyy-Sobchuk. Il considère ce film comme l'aboutissement d'une évoution dans son parcours. Auparavant, il a signé plusieurs courts, dont Intersection, et un documentaire, Krasna Malanka, en 2013, qui s’attachait à ceux qui préparaient le carnaval de Malanka. Ces deux films ont été tournés dans une zone frontalière méconnue, entre l’Ukraine et la Roumanie. "Beaucoup de choses y demeurent « hors normes », en particulier la pratique de la contrebande, sur laquelle j’ai recueilli de nombreux témoignages hors champ, au cours des conversations avec des hommes jeunes et moins jeunes qui ont basculé dans le trafic. À travers l’histoire de Pamfir, je voulais au départ aborder la question de l’émigration ukrainienne et du gouffre qui sépare l’Ukraine et l’Union Européenne."
Le réalisateur voulait aborder la question de l’émigration ukrainienne, tout en racontant l'histoire d’un homme ordinaire poussé au désespoir et qui est amené à transgresser la loi et la morale. "C’est donc l’histoire d’un homme honnête qui devient une bête, mais aussi une histoire d’amour, tendre et cruelle à la fois."
Le mythe biblique d’Abraham se rejoue dans Le Serment de Pamfir selon les codes de la tragédie grecque sur fond du carnaval ukrainien de Malanka. Le réalisateur explique : "Ma mission, en tant que réalisateur, consiste à concevoir un film axé sur l’action, avec un minimum de dialogues, reposant sur une histoire universelle, accessible et émouvante pour tous les spectatrices et spectateurs."
Le film se déroule durant la Malanka, une fête traditionnelle ukrainienne aussi appelée carnaval ou bacchanale. C’est une fête ancestrale où chaque participant porte un masque bien spécifique et endosse un rôle social différent. Dans l’ouest de l’Ukraine, on fête la Malanka toute la nuit du 13 au 14 janvier. Dans certains villages, la Malanka est l’un des personnages du carnaval ou le carnaval lui-même. Elle s’invite dans chaque maison du village. Les habitants jouent une scène ou entonnent des chants, boivent et dansent. Le réalisateur précise : "Dans la plupart des villages, l’année est rythmée par la fête de la Malanka, davantage que par le Nouvel An ou Noël. On s’y prépare pendant très longtemps. Chacun choisit un costume en fonction de sa conception de l’événement. C’est en cela que je trouve ce phénomène intéressant car chacun choisit un costume qui traduit la vision qu’il a de soi – et ce choix est délibéré."
Le film se déroule dans la région multiethnique de Tchernivtsi dont le réalisateur est originaire. "Le Tchernivtsi est une région au carrefour de toutes les cultures qu’on ne peut trouver que dans une zone frontalière. Il y a là des Roumains, des Moldaves, des Arméniens et d’autres nationalités y sont aussi représentées." Dmytro Sukholytkyy-Sobchuk décrit cette région comme une sorte de tour de Babel. Cette diversité des cultures aboutit à un syncrétisme religieux, où la population croit autant à Dieu qu'aux rites païens. "Quand j’étais enfant : lorsque j’étais malade, on m’emmenait non seulement voir un médecin, mais aussi une voyante", se souvient Sukholytkyy-Sobchuk.
Le réalisateur Dmytro Sukholytkyy-Sobchuk et le monteur Nikodem Chabior ont chacun monté les rushes de leur côté pendant la pandémie, livrant leur propre version du film. Ils se sont ensuite retrouvés pour monter ce que le réalisateur appelle "un troisième film" : "Le plus gros défi, c’était de trouver le moyen de débuter et de conclure chaque scène. Il fallait conserver l’énergie de la scène précédente pour enchaîner avec la suivante. On a fait de notre mieux pour conserver l’unité d’une tragédie empruntant à plusieurs genres."