Mabrouk el Mechri s’est inspiré de sa mère, Zohra, et de sa fille de 8 ans : « Je trouve qu’il manque cruellement de films qui pourraient s’adresser à elle sans être forcément un Disney ou un Marvel. 8 ans, c’est l’âge que j’avais quand j’ai découvert Rocky. Je voulais que ma fille ait son Rocky [...].»
Après une expérience outre-Atlantique avec Sans issue, dans lequel il dirigeait Henry Cavill et Bruce Willis, et avoir travaillé sur des séries (Nox et Maison close), Mabrouk El Mechri désirait revenir à un projet plus personnel : « Retrouver un désir plus viscéral de raconter des histoires. Me défaire de ce milieu pour me réconcilier avec mon métier. Explorer mon histoire familiale aussi, essayer d’y trouver des histoires susceptibles de passer la membrane de pudeur qui m’a parfois parue "empêchante" sur mes films précédents. Je voulais aussi bénéficier de mon expérience et ma culture du genre mais dans un espace francophone. »
Le réalisateur se défend d'avoir fait un film idéologique : « je ne cherche pas à faire passer un message. Je ne crois pas aux films à thème. Je crois aux histoires et aux personnages. Quasiment tous mes films portent le nom de leurs personnages. Quand je dis que le film raconte l’histoire de ma mère, il s’agit plutôt d’un point de départ, une proposition où le cinéma me permettrait de raconter l’histoire de mes parents que j’aurais préféré raconter à mes enfants. »
Le réalisateur s’est interrogé sur la façon de représenter la violence dans son film, « comment neutraliser le choc de la violence pour permettre au spectateur de continuer de la regarder en face, de ne pas détourner le regard sur ce couple au moment où la violence apparaît. Le public doit avant tout comprendre la dynamique et les interactions de ce couple, et d’où naît la violence entre eux. C’est là tout l’enjeu du film : explorer cet espace-temps où la léthargie initiale qui empêche de décamper, légitime les abus un peu plus chaque jour. » Inspiré par les westerns spaghetti avec Terence Hill et Bud Spencer, où les bruits des coups étaient grotesques, il a décidé de neutraliser le choc de la violence pour ne pas détourner le regard : « Et c’est là où les balises stylistiques du film de Kung-Fu m’ont permis d’explorer cette arène. L’appartement familial comme le lieu d’un combat. »
Le choix de Sabrina Ouazani pour jouer Zohra était une évidence pour le réalisateur : « C’est l’une des meilleures actrices de sa génération, elle prête d’emblée une solarité indéniable au personnage. Une garantie de non-misérabilisme. Elle rit beaucoup. J’adore sa voix rugueuse qui épouse parfaitement les contradictions du personnage. »
Les vidéos d’auto-défense que regarde Zohra sur YouTube ont été conçues spécialement pour le film. En faisant des recherches, le réalisateur est tombé sur des vidéos d’un professeur de self-défense, Franck Ropers, et l’a tout simplement contacté pour qu’il joue dans le film.
Mabrouk el Mechri ne cache pas l’influence de Karaté Kid sur son film : « On ne peut pas ne pas se rendre compte qu’on marche dans des sentiers déjà battus. C’est un film sur l’apprentissage d’un art martial avec un gardien de gymnase asiatique après tout… [...] Plus qu’une inspiration il s’agissait de faire un clin d’oeil à un classique du genre.» À l’origine, le personnage masculin devait être plus jeune mais le réalisateur craignait qu’il y ait une ambiguïté entre lui et l’héroïne et qu’elle tombe amoureuse de lui : « Elle n’a pas besoin d’un nouvel amour pour trouver la force de quitter son mari. » (Extrait d’une interview de cineuropa.org le 02/02/2022)
Le film est raconté par une narratrice qui n’est pas Zohra : « Je me suis dit qu’il valait mieux que la protagoniste, avec l’humilité et la modestie qui la caractérisent, ne raconte pas sa propre histoire. Le récit devenait du même coup une sorte de conte et ça me plaisait. De plus, un narrateur est souvent omniscient, je ne voulais pas mettre Zohra dans une situation de conscience, puisque le sujet était justement la prise de conscience. »