Le film a fait partie de la Sélection Officielle de Cannes 2020.
Au commencement est librement inspiré d’une histoire vraie, celle d’une mère qui a commis l’impensable et n’a jamais expliqué les raisons de son geste. La réalisatrice est devenue obsédée par ce fait divers : « Cette femme […] m’était atrocement familière, comme quelqu’un que j’aurais pu connaître dans la petite ville rurale dans laquelle j’ai grandi. Elle me rappelait ces femmes que j’ai tant côtoyées, promises par leurs mères et mariées dès l’âge de quinze ans, privées de rêve et de futur, et à qui on ôte le droit de choisir, de se tromper et d’apprendre. À ces femmes, on a retiré un droit essentiel : celui de devenir des êtres libres. » Au final, le personnage de Yana n’a pas grand-chose à voir avec cette femme : « j’ai compris que le film ne raconterait pas l’histoire de son crime, mais bien la sienne. Sa vie intérieure, ses habitudes, sa normalité, son quotidien banal. En d’autres mots, tout ce qui précède son crime. [...] Et tous les évènements dans le film sont le produit de mon imagination. »
Le film se déroule dans le village de Lagodekhi, qui borde les montagnes du Caucase, à la frontière de l’Azerbaïdjan. La vie y est austère et la spiritualité prend forme par des dogmes religieux très ancrés dans la vie quotidienne des habitants. Environ 84% de la population géorgienne est de confession chrétienne orthodoxe, une institution puissante qui prend racine dans l’identité du peuple géorgien mais qui est aussi au coeur de l’État. Les autres confessions religieuses, comme celle des Témoins de Jéhovah, sont considérées comme des religions de seconde classe et sont marginalisées.
Au commencement suit une femme qui n’a jamais pu se définir par elle-même et qui est en quête de sa propre identité. Dea Kulumbegashvili développe : « Au-delà du conflit religieux et de l’intolérance que l’être humain peut avoir pour ce qui lui est étranger, c’est l’exploration de la vie intérieure d’une femme qui m’intéresse particulièrement ici ; une femme qui selon les normes sociétales de son environnement n’est qu’un personnage secondaire. Autrement dit, la femme d’un responsable religieux. »
La réalisatrice décrit le personnage d’Alex comme « une métaphore de la loi, de la nature oppressante de l’État ». Elle précise : « Tous les personnages rencontrent Alex, mais aucun d’entre eux ne peut vraiment l’appréhender ou le confronter. Pour Yana, sa relation avec lui s’apparente à de l’auto-mutilation. »
La réalisatrice a conçu la structure du film comme la chute du troisième chapitre de la Genèse, celle de la disgrâce : « Comme Ève qui se heurta aux limites du Paradis pour faire un pas vers l’inconnu, Yana fait ce même pas. Elle repousse ses limites au-delà de la transgression pour s’aventurer vers l’interdit, jusqu’à commettre un acte fondamentalement opposé au cycle naturel de la vie. »