C’est la productrice Hélène Cases qui est à l’origine du projet. Elle est allée à la rencontre de Christophe Barratier pour lui proposer de porter l’œuvre de Marcel Pagnol à l’écran. Le réalisateur se souvient : « Flair ou prémonition, je ne sais pas, mais elle avait frappé à la bonne porte, car la découverte de Pagnol remonte à mon plus jeune âge. » Il a en effet grandi avec son travail grâce à sa grand-mère maternelle, Marie Simonet, qui s’illustra notamment au théâtre avant-guerre et qui avait joué ses pièces à de nombreuses reprises. « Les murs de son appartement - dans lequel j’ai vécu jusqu’à mes 8 ans - étaient constellés de photos avec Charpin, Henri Poupon et même Raimu. Grâce à elle, j’ai découvert Le Schpountz, La Fille du puisatier, La Femme du boulanger et la trilogie des Marius. »
Le Temps des secrets est le troisième des quatre tomes des Souvenirs d'enfance, roman autobiographique de Marcel Pagnol paru en 1960. Les volets précédents, La Gloire de mon père et Le Château de ma mère, ont été portés à l’écran par Yves Robert en 1990.
« Le fait que le récit ne soit pas bouclé était le problème majeur de l’adaptation. Il fallait donc revoir toute la structure pour lui donner une cohérence dramaturgique », explique Christophe Barratier. Alors que le récit relève davantage de la chronique, il a fallu dessiner une intrigue générale et un objectif clair au personnage principal. « Muscler certaines péripéties, charmantes à l’écrit, mais un peu faiblardes à l’image, tout en restant fidèle à l’univers pagnolesque. »
Petit-fils de Marcel Pagnol et ayant droit de l’auteur, Nicolas Pagnol confie au sujet de cette adaptation : « Qui mieux que Christophe Barratier, après le succès des Choristes, pouvait réussir la mise en valeur de l’enfance de Marcel et la poésie de cette Provence. Cette confiance que j’ai placé en Hélène [Cases, productrice] et Christophe a largement été récompensé par le résultat. Un film qui s’inscrit pleinement dans la suite des films d’Yves Robert tout en ayant la "patte" Barratier. En quelques mots : la famille Pagnol est très heureuse de cette collaboration qui remet à nouveau Marcel Pagnol sur le devant de la scène. »
Le casting a débuté en décembre 2019 dans toute la Provence. C’est à ce moment-là qu’ont été trouvés Baptiste Négrel (Lili) à Aubagne, Lucie Loste Berset (Isabelle) à Marseille et Tristan Margheriti (Lagneau) dans un quartier proche du Vélodrome. Mais l’interprète du jeune Marcel manquait. Le confinement a été bénéfique et a permis à l’équipe d’obtenir un peu plus de temps. Quelques semaines avant la date butoir, Léo Campion a finalement été trouvé en région parisienne ! « C’est l’intensité de son regard, sa présence, et son intelligence des situations qui m’ont convaincu », affirme Christophe Barratier. Le jeune acteur n’avait aucune expérience d’acteur avant d’être choisi.
Jouer ou non avec un accent marseillais a fait l’objet de nombreux débats au sein de l’équipe. Le réalisateur souligne : « l’accent du midi n’est pas quelque chose de binaire : il suffit de se promener dans Marseille et l’ensemble de la région PACA, pour relever autant d’intonations que de quartiers ou de villages. D’une ville à l’autre, d’une colline à celle d’en face, d’un faubourg populaire à un quartier chic, l’accent du midi se mesure sur une échelle de 1 à 100, en passant par les décimales ». Si la question de l’accent ne s’est pas posée pour les acteurs locaux, il a été décidé pour le reste du casting de rester sobre « tout en épousant quelques sonorités propres au midi, comme de prononcer les "e" muets et d’ouvrir les "o". »
Le Temps des secrets a été filmé dans la même maison que celle utilisée par Yves Robert dans La Gloire de mon père et Le Château de ma mère. « Je n’allais pas changer pour changer, histoire de faire le malin car impossible de trouver plus idéal. Nichée au cœur des collines, elle offre sur un panorama à 360 degrés exempt de toute pollution anachronique », révèle le réalisateur. L’équipe a eu la liberté de la restaurer entièrement, en partie grâce à la mairie d’Allauch.
Les rapaces ont été fournis par des fauconniers locaux, les chèvres, moutons, chevaux et mulets par des éleveurs de la région. L’équipe a aussi fait appel au dresseur animalier Pierre Cadéac. « Mais pour arpenter ces collines à la fois proches et secrètes avec une équipe de cinéma de 80 personnes, des dizaines de camions et des tonnes de matériel, il était indispensable de s’entourer de vrais connaisseurs du terrain. La garrigue est un domaine exigeant à l’accès très réglementé », précise le réalisateur.
Grâce aux effets spéciaux, un pont transbordeur qui passait d’une rive à l’autre du vieux port et un funiculaire qui grimpait la colline de Notre-Dame de la Garde ont été reconstitués. L’équipe a pu tourner dans des endroits encore préservés, comme le quartier du Panier dont on aperçoit les rues pavées au début du film.
Le film s’ouvre et se referme avec Marcel Pagnol adulte, campé par Marc Barbé : « Au-delà de sa ressemblance frappante avec Pagnol, c’est un acteur rare, que j’apprécie depuis longtemps », déclare Christophe Barratier. Celui-ci a décidé d’ajouter cet élément instinctivement : « Sans doute parce qu’il permettait de rappeler qu’il s’agit d’un récit autobiographique, sans avoir à recourir à la voix-off. Marcel avait 60 ans quand il a écrit ses Souvenirs d’enfance ».