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    La Conspiration du Caire
    Anecdotes, potins, actus, voire secrets inavouables autour de "La Conspiration du Caire" et de son tournage !

    Une université mythique

    La Conspiration du Caire est un thriller politique qui se déroule à Al-Azhar, une université mythique du Caire qui est aussi l'épicentre du pouvoir de l'islam sunnite. Le grand-père de Tarik Saleh, né dans un petit village au cœur du Delta du Nil, a été admis à Al-Azhar (à l’époque la plus prestigieuse université de l’Afrique et du Moyen-Orient). Le metteur en scène se rappelle :

    "Il a été le premier dans son village à recevoir une véritable éducation. Al-Azhar a été bâtie par les Fatimides au cours du Xème siècle et a représenté, dès le début, le lieu fondamental des études islamiques. Les Fatimides étaient des musulmans chiites mais, quand Salah ad-Din – chez vous, Saladin – a pris le pouvoir au XIIème siècle, la première mesure qu’il prit fut de convertir Al-Azhar en institution sunnite."

    "Depuis toujours, l’Egypte a été occupée par des étrangers. La plus longue période a été celle des Turcs, puis celle des Britanniques, suivie de près par les Français. Malgré tout, Al-Azhar a toujours réussi à coexister avec le pouvoir politique en place. C’est compréhensible puisque l’université a toujours été respectée et considérée comme la plus importante source de savoir sur l’islam au monde."

    "Ma grand-mère a elle aussi reçu une éducation. Bien qu’elle n’ait pas pu aller à Al-Azhar, cela reste très impressionnant pour l’époque. Mes grands-parents venaient tous deux de villages reculés et en un seul voyage, ils ont fait ce saut énorme d’un lieu quasi-médiéval à la modernité de la ville. J’ai voulu montrer les enjeux que symbolise le départ d’un village pour suivre des études. Quel est le prix à payer ?"

    Cannes 2022

    La Conspiration du Caire a été présenté en compétition au Festival de Cannes 2022, où il a obtenu le Prix du scénario.

    Naissance du projet

    Tarik Saleh a relu Le Nom de la Rose, le thriller médiéval d’Umberto Eco qui se déroule dans un monastère, en se posant les questions suivantes : "Et si je racontais une histoire de ce genre mais dans un contexte musulman ? Est-ce que ce serait possible ? Est-ce que j’en aurais le droit ? Est-ce que c’est dangereux ?"

    "La même sensation que celle de jouer avec le feu lorsqu’on est enfant. Une fois que j’ai eu commencé à suivre cette pensée, je n’ai pas pu m’arrêter. Non seulement je pouvais le faire, mais je devais le faire. J’ai donc commencé à imaginer une histoire qui se déroulerait à notre époque."

    "J’ai imaginé un jeune homme, Adam, fils de pêcheur, qui obtiendrait une bourse pour partir étudier à Al-Azhar. Il est persuadé que son père va s’y opposer car il a besoin de lui pour la pêche quotidienne. Finalement, à sa grande surprise, son père accepte car il y voit la volonté de Dieu."

    Tournage en Turquie

    Tarik Saleh n'a pas pu tourner La Conspiration du Caire en Égypte. En 2015, trois jours avant le début du tournage du Caire confidentiel, les services de sécurité égyptiens lui ont ordonné de quitter le pays. Depuis, le réalisateur fait partie d’une liste d’indésirables qui, s’ils reposaient le pied sur le sol égyptien, seraient immédiatement arrêtés. Il explique :

    "La décision a même été rendue publique à la télévision égyptienne. (...) Nous avons tourné La Conspiration du Caire en Turquie. Pour représenter Al-Azhar, nous avons pu tourner dans la Mosquée Süleymanye d’Istanbul, un bâtiment magnifique bâti au XVIème siècle, dont le maître d’œuvre, Sinan, a formé l’architecte de la Mosquée Bleue."

    "Dans l’islam sunnite, on ne représente pas l’être humain, donc les motifs visuels sont des figures géométriques. J’ai aimé la puissance graphique qu’elles offraient, notamment dans les scènes de la cour de l’université. On m’a fait remarquer qu’elles font penser à un échiquier sur lequel s’affrontent les différents courants de l’islam. C'est tout à fait ça !"

    Référence carcérale

    Tarik Saleh, le directeur de la photographie Pierre Aïm et le chef décorateur Roger Rosenberg avaient pour référence visuelle le film de prison : "À Al- Azhar, comme dans une prison, il y a la cour, la cantine, etc. Tous les lieux balisés du genre. Je ne sais pas ce que penseront du film les autorités égyptiennes et les étudiants et professeurs de l’université Al-Azhar."

    "Les opinions officielle et officieuse seront probablement très différentes. Le Caire confidentiel a été officiellement perçu comme une attaque contre la police égyptienne, mais j'ai reçu beaucoup de courriers de policiers égyptiens qui ont adoré le film..."

    Le pouvoir au sein d’une institution

    La Conspiration du Caire est une histoire sur le pouvoir et sur l’autorité (pas spécifiquement à propos de l’islam). Lorsque Tarik Saleh écrivait le film, il y a eu, au même moment, un scandale à l’Académie de Suède, qui décerne notamment le Prix Nobel de Littérature. Le cinéaste se rappelle :

    "Cela m’a beaucoup intéressé parce que voilà une institution au sein de laquelle un petit groupe de personnes ont un immense pouvoir : celui de désigner le meilleur écrivain du monde."

    "Malheureusement, ces personnes ont abusé de ce pouvoir, se sont crues au-dessus des lois. Les gens ont commencé à les critiquer et très vite l’institution a été à deux doigts de s’écrouler. La manière dont les gens ont réagi m’a beaucoup inspiré pour imaginer la situation à Al-Azhar."

    Retrouvailles

    Tarik Saleh retrouve son acteur fétiche Fares Fares après The Contractor (2022), Le Caire Confidentiel (2017) et Metropia (2009).

    Le colonel Ibrahim

    Dans toutes les institutions d’état, il y a un personnage incroyable qui a connu tous les changements de direction, a survécu à toutes les mutations de l’institution et a même réussi à se cacher quand on essayait de faire partir les vieux employés. Voilà comment Tarik Saleh voyait Ibrahim :

    "Il était déjà là sous Moubarak, il a probablement été formé par les Roumains de la Securitate, au temps où l’Égypte pactisait avec le bloc de l’Est ; son supérieur, Sobhy, a lui été formé par les Américains, par la CIA, et il est beaucoup plus brutal. L’Égypte s’est toujours alignée sur le pays le plus offrant..."

    Inspiration familiale

    Fares Fares a lui-même travaillé le look d'Ibrahim, en s’inspirant d’un de ses oncles. Tarik Saleh se rappelle : "Je lui ai demandé s’il était sûr de vouloir aller aussi loin, et puis j’ai adoré le résultat. En voyant Ibrahim, on imagine d’emblée qu’il a des problèmes d’hypertension, peut-être qu’il a subi un pontage."

    "Comme avec Adam, tout le monde sous-estime Ibrahim. Il a l’air de quelqu’un qui ne sait pas ce qu’il fait. Mais il a compris avant tout le monde la stratégie du Cheikh aveugle, et il est prêt à le laisser faire parce qu’au fond, c’est peut-être sa dernière mission. Évidemment, il ne le dit pas... Je suis un fan de John Le Carré, j’aime quand les personnages cachent les motifs réels de leur action."

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