Le film adapte le court roman d'Henry James, La Bête dans la jungle, paru pour la première fois dans le recueil The Better Sort en 1903. Il raconte l’histoire d’un homme qui attend un événement extraordinaire qui changera toute sa vie. Il demande à une femme de l’attendre avec lui, jusqu'à une issue tragique. Pour Patric Chiha, "l’histoire de ce couple a la force d’un mythe. Elle nous rappelle à notre condition d’être humain toujours tiraillé entre le présent et le rêve, la réalité et le fantasme." Hanté depuis longtemps par ce texte qui parle de passer à côté de sa vie, le réalisateur a eu envie de le porter à l'écran car "cette tension-là, entre présent et fantasmes, vie réelle et vie rêvée, a aussi à voir avec le cinéma".
Le réalisateur décrit l'histoire de La Bête dans la jungle comme "à la fois très simple et très mystérieuse." Il ajoute : "C’est quoi la Bête ? Quel est ce danger qui rôde autour d’eux ? Qu’est-ce qu’attendre une autre vie ? Passer à côté de sa vie ? Dans le roman, c’est limpide et en même temps quelque chose nous échappe. Je mentirais en disant que j’ai entièrement compris le roman. On fait des films justement parce que quelque chose nous frappe, nous émeut et qu’on ne saurait nommer ou expliquer." Il a pris soin, de l'écriture au tournage en passant par le montage, de conserver le mystère de son récit, sans tenter de l'expliquer à tout prix.
Tom Mercier incarne John, un personnage qui ne vit pas sa vie et passe à côté d'elle. Le réalisateur revient sur la manière dont il l'a dirigé : "Tom doit jouer quelque chose de très complexe, car son personnage a peu d’outils narratifs ou psychologiques pour évoluer. Il est vraiment à l’arrêt. On travaillait beaucoup en répétition sur comment se tenir, s’affaler, s’asseoir, avec en tête l’idée qu’il est presque un pantin et pas tout à fait solide. C’est très physique ce qu’il fait, même si ça se voit peu à l’image."
A l'inverse de son partenaire de jeu, Anaïs Demoustier incarne un personnage très expressif. May est exaltée et joyeuse. Patric Chiha explique : "Anaïs et moi avons cherché du côté de l’hypersensibilité, de l’hyperémotivité et du surjeu. En boite de nuit, toute émotion est amplifiée, la vie est une fiction. [...] Cette question de la fiction et de la réalité, du surjeu et de la « nudité », je l’ai abordée avec tous les comédiens. Comme si au bout de l’artificialité, de l’exagération, de l’exaltation propre à la nuit, nous devenions de nouveau nous-mêmes."
Patric Chiha a écrit le personnage de la physionomiste pour Béatrice Dalle, qu'il avait dirigée dans son premier long-métrage, Domaine, sorti en 2010. Il voulait retravailler avec l'actrice : "Sa présence à la fois si concrète et si détachée ou flottante me bouleverse toujours."
Le film transpose le roman d'Henry James dans une boîte de nuit. C'est lorsqu'il a eu cette idée de décor que le réalisateur s'est plongé dans l'adaptation de La Bête dans la jungle : "Ce décor quasi unique fait du film une sorte de documentaire sur une boite de nuit de 1979 à 2004. La boite de nuit est à la fois l’espace euphorique du présent permanent, de l’éternelle jeunesse, et l’espace mélancolique du temps infini parce qu’en dehors du réel, du quotidien. C’est un théâtre où l’on rêve la vie plus qu’on ne la vit. C’était donc l’espace idéal pour mettre en scène l’histoire de May et de John qui sont enfermés dans leur quête de l’absolu."