Les Racines du monde : les secrets du tournage

Les Racines du monde est le quatrième film de Byambasuren Davaa, après L'Histoire du chameau qui pleure, Le Chien jaune de Mongolie et Les Deux chevaux de Gengis Khan, sur les rituels et le mode de vie nomades en Mongolie. La réalisatrice explique : "L’urgence de parler de ces mutations brutales que traverse mon pays. J’étais en train de développer un autre film avec mes producteurs allemands quand au retour d’un voyage dans mon pays natal, j’ai eu un déclic. J’ai écrit cette histoire. Je me devais d’évoquer l’exploitation abusive des steppes, le déracinement des nomades, l’assèchement des sources d’eau et la destruction des paysages. Dans certaines rivières, vous ne pouvez plus pêcher de poissons à mains nues comme jadis. Je n’avais pas d’autres choix, c’était ma responsabilité d’en parler."

Au cours des 25 dernières années, la question des ressources naturelles a profondément déchiré la Mongolie. Byambasuren Davaa confie : "Les puissances étrangères ont souhaité que nous restions simples fournisseurs de matières premières au détriment de notre croissance. Je souhaite vraiment éveiller la conscience du peuple mongol afin que notre pays ne soit pas dévasté. Avec la crise écologique mondiale, la Mongolie peut enseigner au monde la connaissance et le respect de la nature. Et je souhaite que nous nous développions dans cet esprit. J’espère que le public étranger pourra apprécier la beauté de mon pays d’origine et ainsi prêter plus d’attention à la façon dont les autres états traitent nos ressources."

Dans ses films, Byambasuren Davaa essaye de refléter le monde dans sa plus petite unité humaine, à savoir la famille. Les Racines du monde est ainsi une fiction se déroulant sur un fond documentaire. La cinéaste précise : "Nous avons travaillé avec des acteurs, mais aucun décor n’a été construit pour le film. On tournait au milieu de la zone minière. Dans le film, l’arbre sur la colline est juste à la frontière avec la zone minière. Nous avions prévu d’avoir recours à des effets visuels pour certaines scènes, mais nous n’en avons finalement pas eu besoin. Les prospecteurs sont venus beaucoup plus près que nous ne l’avions imaginé. Ce fut une grande chance pour moi en tant que réalisatrice, mais une tragédie en tant que mongole."

Lors des auditions, les producteurs ont remarqué que les enfants des nomades mongols chantaient très naturellement. "Le chant harmonique est à l’origine de ces chansons. Il est né de l’imitation de sons d’animaux et, pour moi, c’est la forme d’expression qui illustre le mieux la proximité des Mongols avec la nature. Mais les enfants sont aussi très connectés et friands de jeux télévisés comme je le montre dans mon film. Tradition et nouveaux médias coexistent dans la vie de tous les jours", raconte Byambasuren Davaa.