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    Interdit aux chiens et aux Italiens
    Anecdotes, potins, actus, voire secrets inavouables autour de "Interdit aux chiens et aux Italiens" et de son tournage !

    Un projet qui remonte à 2013

    Interdit aux chiens et aux Italiens a été conçu comme un dialogue fictif avec Cesira, la grand-mère décédée du réalisateur Alain Ughetto, à qui ce dernier demande tout ce qu’il aurait aimé savoir (un témoignage du vécu de ces générations de migrants italiens et un hommage à leur courage). Il explique :

    "Lors des repas de famille, mon père racontait qu’il y avait dans le Piémont en Italie un village qui s’appelait Ugheterra où tous les habitants portaient le même nom que nous. À sa mort, je suis allé voir si ce village existait. Il existait : Ugheterra, la terre des Ughetto ! Mon enquête a commencé là, il y a neuf ans, le film aussi."

    "Dans le cimetière, je n’ai trouvé ni la tombe de mon grand-père Luigi, ni celle de ma grand-mère Cesira… Que s’est-il passé ?... Les témoins de cette époque italienne (les années 1870) ont disparu, les toits des maisons se sont effondrés sur leur passé de paysan ; les arbres ont repoussé sur leur vie de charbonnier."

    "Le cadeau de ce film a été la découverte du livre de Nuto Revelli, Le monde des vaincus. Ce sociologue italien a enregistré les témoignages de paysans et de paysannes du même âge que mes grands-parents et qui vivaient dans le même endroit du Piémont. Des témoignages poignants sur la faim, la misère, les guerres…"

    Naissance du projet

    À Ughettera, Alain Ughetto a ramassé tous les objets qui faisaient leur quotidien : du charbon de bois, des brocolis, des châtaignes, etc. Revenu dans son atelier, le metteur en scène a composé un décor : "Les brocolis deviennent des arbres, le charbon de bois fait montagne, les sucres font brique…"

    "Au cœur de mon atelier, avec Jean-Marc Ogier et son équipe, nous avons reconstruit ce monde disparu. Nous nous souvenons de notre père, de notre mère, un peu de nos grands-parents, mais au-delà plus grand chose : c’est le noir, c’est la grande histoire."

    "Ce qui m’intéressait, c’était de remonter le cours du temps pour lier mémoire intime et évocation historique. Aujourd’hui derrière mon nom, j’ai trouvé un récit, la chronique d’une famille parmi des centaines d’autres. Pour écrire cette histoire, je me suis inspiré du réel."

    "Du réel de la vie d’une partie de ma famille originaire du Piémont italien. J’ai fouillé dans ma mémoire, puis dans celle de mes cousins, de mes cousines, de mes frères et sœur. Entre guerre et migration, entre naissance et décès, un récit s’est tracé."

    "Au-delà du chagrin que procure l’histoire personnelle, j’ai découvert un parcours étonnant, raconté dans le film."

    Conception des personnages à Rennes

    Dans les ateliers de Vivement lundi ! à Rennes, Alain Ughetto et son équipe ont construit les personnages : Luigi, Cesira, Vincent (le père), ainsi que les nombreuses poupées qui les accompagnent. "Cesira est devenue la figurine de 23 cm de haut qu’on voit dans le film. En la questionnant, elle m’a raconté son histoire, sa vie en Italie, sa rencontre avec Luigi, le voyage avorté en Amérique, pourquoi la France ?", se rappelle le cinéaste.

    Qui est Alain Ughetto ?

    Alain Ughetto a hérité de son père et de son grand-père un goût prononcé pour le bricolage qu’il infuse dans son cinéma par l’animation, un vecteur pour explorer l’intime. En 1985, Alain Resnais lui remet le César du meilleur court métrage d’animation pour La Boule.

    En 2013, il réalise Jasmine, où se joue son histoire d’amour dans le tumulte de Téhéran à la fin des années 70. Après une longue maturation, il revient aujourd’hui pour façonner l’histoire de son grand-père et, à travers elle, celle de nombreux immigrés italiens.

    Développer la trame

    Le projet a été proposé, développé et soutenu par Alexandre Cornu, producteur des Films du Tambour de Soie, à Marseille, avec qui Alain Ughetto avait déjà réalisé son film précédent : Jasmine. Avec le scénariste Alexis Galmot, qui a pris le relais d’Anne Paschetta (qui avait développé la partie la plus documentée), le metteur en scène a alors adapté le récit, trouvé une trame et ajusté les scènes.

    "Luigi, Cesira, mon père, tous étaient en place, il me fallait maintenant m’intégrer à ce récit… Le thème qui m’a intéressé, c’est la transmission de main en main. Les mains de mon grand-père ont transmis leur savoir aux mains de mon père, les mains de mon père m’ont à leur tour transmis leur savoir et aujourd’hui je m’en souviens ; aussi je me devais de témoigner", confie Alain Ughetto, en poursuivant :

    "La main, ma main, est devenue un personnage, un personnage qui agit sur ce monde et dans l’atelier, la main travaille, questionne et intervient."

    Tournage long

    Le film a été en grande partie tourné à Beaumont-les-Valence dans les studios de Foliascope, de janvier 2020 au 31 juillet 2021. Le Covid 19 et des tempêtes de neige ont retardé la fin du tournage.

    Signification du titre selon Alain Ughetto

    "Au départ : une image ancienne qui circule sur le net, celle d’un panneau en noir et blanc accroché à la devanture d’un vieux café, m’a intrigué : Interdit aux chiens et aux italiens. Je pensais que cette image arrivait de Savoie, ou de l’Ain ou peut-être de la Suisse, mais en fait sa première apparition a été en Belgique."

    "D’autres pays ont suivi, mais elle était dans mon histoire. La violence, la cruauté et la férocité de ce petit panneau qui accueillait les migrants s’adapte parfaitement à l’évocation historique qui fonde la thématique de ce film. Une scène entière est consacrée à cette affichette qui en est devenue le titre."

    Constructeurs invisibles

    Ce qui intéressait Alain Ughetto dans ce projet de film était de montrer des gens au travail qui ont construit, en France, nos infrastructures. Le réalisateur explique : "Tunnels, routes, ponts, barrages, des gens qui sans se cacher restent totalement invisibles."

    "J’ai éclairé cette histoire qui commence par « je » et glisse très vite vers « nous ». Que nous soyons polonais, espagnol, portugais, indien, vietnamien ou maghrébin, le passé est dans notre ADN. En écho avec aujourd’hui, je voulais témoigner du « comment, à cette époque, on accueillait tous les étrangers »."

    "Je travaille sur ce film depuis maintenant neuf ans et j’en aime toutes les images C’est un film unique où chacun a apporté son savoir, ses connaissances, ses compétences, sa mémoire."

    "Un travail d’équipe, une longue et belle aventure commune où nous nous sommes mis tous ensemble, producteurs, animateurs, techniciens arrivant de tous les coins de l’Europe pour vous présenter ce beau, ce magnifique cadeau. Un film témoignage, mais avant tout un film d’amour."

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