La Fièvre de Petrov offre une errance à travers une Russie en mutation, fracturée entre l’ombre de son passé et son présent chaotique. La fièvre, omniprésente, devient le cœur battant du récit : un symptôme et un symbole, à la fois intime et sociétal.
La narration refuse une linéarité classique, optant pour une structure fragmentée où passé, présent, et hallucinations se superposent. Ce procédé reflète l’esprit troublé de Petrov, mais aussi le vertige d’une nation à la dérive, privée de repères. Les séquences oniriques, oscillant entre le grotesque et l’hyperréalisme, brisent les frontières entre le réel et le rêve, plongeant le spectateur dans un état d’incertitude, nous obligeant à s'interroger sur la nature des images que l'on receptionnne.
Les scènes de violence, qu’elles surgissent des scènes dans les transports publics ou dans les interactions les plus banales, exposent une brutalité latente devenue norme. Ces lieux, où l’individualité se dilue dans la masse, incarnent une société à l’arrêt, où chacun se laisse porter par un flux sans but ni horizon. L’agressivité et l’absurde s’y mêlent, traduisant une aliénation collective où l’humanité semble condamnée à la méfiance et à la dureté.
Mais une échappatoire scintille en mirage : la soucoupe volante. Ce motif, récurrent et énigmatique, incarne un rêve d’un ailleurs, la promesse d’un espoir pour une génération post-soviétique. Cette figure, à la fois utopique et mélancolique, reflète les aspirations déçues d’un peuple.
Dans cette impossibilité de narration, l’art émerge comme un sanctuaire. Il devient, pour Petrov et pour son créateur, un espace de liberté où les émotions et les idées trouvent un souffle salvateur.
En somme, chaque motif participe à une symphonie maladive qui explore la condition humaine dans une Russie en crise. Serebrennikov ne livre pas toutes les clés de son énigme, mais il dévoile avec brio la puissance de l’art à transcender les maux d’un homme et d’une nation.