Bon, ben pas grand-chose à redire sur ce Clouzot, film que je ne connaissais pas et dont la découverte a été une révélation ! Le réalisateur m’inspirait déjà le mieux avec des films comme Les Diaboliques, mais je dois dire qu’ici il confirme tout son talent, et dès ses débuts.
Le métrage frappe surtout par sa très grande modernité. Appuyé par des dialogues très affutés (excellente réplique des cuisses !), il peut volontiers se montrer vulgaire, provoquant, sexy, et on peine à se croire dans les années 40 en pleine Seconde Guerre ! L’intrigue est excellente, toujours teintée de burlesque, de comédie, de noirceur, et en tous les cas Clouzot ne s’encombre pas de superflu. Il va à l’essentiel, et c’est tant mieux, il en résulte un film rapide, fluide, d’une grande subtilité, dont la révélation peut-être est un poil brusque. Mais cela n’entache guère l’originalité et l’audace de ce film, qui nous trimballe de surprise en surprise pour notre plus grand plaisir !
Le casting est à la hauteur de l’enjeu. Emmené par un Pierre Fresnay malicieux, le film est surtout emporté par des tourbillons de seconds rôles. Suzy Delair déploie une énergie comique rare, et alors qu’on peut facilement la trouver en surjeu, cabotine à l’excès, et bien elle arrive toujours, mystérieusement, à faire passer son personnage ! Elle est aussi adorable que détestable, mais soyons franc, son sourire mutin et ses formes généreuses finissent toujours par la rendre plus adorable ! Autour d’elle, des « gueules » du cinéma, et des interprètes cocasses de personnages cocasses. Noël Roquevert, Jean Tissier, Pierre Larquey, autant de « tronches » du cinéma, au service de rôles excentriques rigoureusement campés. Très drôle.
Sur la forme Clouzot nous sert un film très sobre. Extérieurs studio évident, quelques intérieurs, il fait dans le minimalisme, et cela lui va bien. Les extérieurs studios font vraiment penser à une comédie policière, à l’instar de certaines séquences du film Top Secret des ZAZ, ou de la saga Police Squad du même acabit. Le film ne se veut pas « réel », et du coup le choix de l’artificialité était judicieux, au même titre d’ailleurs que l’orientation théâtrale du film. Il en résulte un côté Cluedo aussi ludique que malin. En tous les cas, le film réussit à transcender ses maigres moyens, et c’est assez rare pour être souligné.
Chef-d’œuvre comique des années 40, L’Assassin habite au 21 est une des pépites de Clouzot, et un incontournable si vous voulez rire de bon cœur devant une comédie à l’humour noir qui n’a pas vieilli. C’est une grande réussite. 5