Ichiko est à la fois complice et victime, c'est ce qui intéressait le réalisateur : « Ichiko apprend à ses dépens que la position sociale, l’estime de soi et les liens humains sont comme les différents étages d’un bâtiment construit sur un sol sablonneux. Et ce sol n’est pas uniquement sous Ichiko, il s’étend sous chacun d’entre nous ».
Le film brouille les pistes niveau temporalité : « Le déclic s'est fait quand je me suis aperçu que jouer sur les strates de temps, était une bonne manière de montrer les différents traits de caractère d'Ichiko. Je n'ai rien inventé, ce n'est finalement qu’un mécanisme hitchcockien de jeu avec le spectateur », explique le réalisateur. Ce procédé lui permet d'apporter de l'ambiguïté à son récit et de s'intéresser à la pluralité de son héroïne : « Comment interagir avec différentes personnes ? Votre façon de parler change quand vous parlez à un enfant. Différents facteurs affectent toujours la façon dont les gens vont interagir les uns avec les autres, de sorte que vous pouvez avoir une pluralité de possibilités ».
Après avoir dirigé Mariko Tsutsui dans Harmonium, Kôji Fukada a eu envie de retourner avec elle. À l'origine, le scénario suivait trois femmes liées dans une histoire et l'une d'entre elle devait être jouée par Tsutsui. Puis le script a évolué pour être centré sur une seule femme, faisant de Tsutsui l'actrice principale de L'Infirmière. Le réalisateur ne tarit pas d'éloges sur sa comédienne : « Elle est très expérimentée, elle a beaucoup joué, non seulement au cinéma mais aussi au théâtre. Elle est aussi toujours très attachée à entrer dans son personnage. Elle fait beaucoup de recherches. Elle se prépare vraiment, et veut comprendre qui elle va jouer. Nous avons une relation basée sur la confiance et, grâce à cela, je sais que je peux écrire mon scénario très librement parce qu'elle sera capable de réaliser pleinement le personnage ».
Le titre original de L'Infirmière, Yokogao, signifie « De profil ». « Ce qui est intéressant avec un profil, c'est que vous pouvez voir un côté ou l'autre, mais jamais les deux profils en même temps », explique Kôji Fukada, soulignant l'idée de dualité de ses personnages.
Kôji Fukada ne cache pas son admiration pour Eric Rohmer : « J'apprécie vraiment chacun de ses films, à tel point que souvent quand je me concentre sur une scène particulière, je pense : "Où et par quel moyen Eric Rohmer aurait-il filmer cette scène particulière ?" Il y a un film qui pourrait peut être considéré comme important pour mon nouveau film : Les Nuits de la pleine lune (1984), où cette fille devient le centre d'une histoire compliquée ».
Le coronavirus a provoqué au Japon une vague d’intimidation et de discrimination contre les malades, leurs familles et les agents de santé. Certains infirmières ne peuvent plus fréquenter certains endroits, qui les rejettent par crainte de la maladie mais aussi par obsession de la pureté, très importante dans la culture japonaise.