Le Bonheur des uns... est la quatrième réalisation de Daniel Cohen après Une Vie de prince, Les Deux mondes et Comme un chef. Avant d’être un film, cette histoire a d’abord été une pièce de théâtre qui a failli se monter à plusieurs reprises... "Un des coproducteurs de cet éventuel spectacle, David Gauquié de Cinéfrance, m’a dit "mais pourquoi tu n’en ferais pas un film ?". Et j'ai développé le scénario. Pendant un moment j’ai essayé de mener les deux projets de front mais c’est finalement le film qui s’est imposé... Et David Gauquié l'a produit", se rappelle le metteur en scène.
Il y a quelques années, Daniel Cohen a assisté à la répétition de la pièce "Le Prénom" d’Alexandre de La Patellière et Matthieu Delaporte (bien avant qu'elle devienne le triomphe que l'on connaît). En voyant le public éclater de rire sur de beaux dialogues et une mécanique explosive, le réalisateur s'est dit qu'il aimerait bien faire quelque chose dans cet esprit. Il se souvient :
"J’ai toujours été intéressé par ce phénomène très humain du groupe où chacun croit être à sa place puis quelqu’un change et ça bouleverse tout le monde ! J'ai aussi pensé à l'écriture de Yasmina Reza, elle-même inspirée par Tchekhov que j’apprécie énormément lui aussi... J’ai donc écrit très rapidement cette pièce de théâtre qui a commencé à rencontrer un intérêt ici et là puis j’ai rencontré David Gauquié et nous sommes assez vite partis sur l’adaptation pour le cinéma qui, elle, a pris un peu plus de temps."
Enfant, Daniel Cohen a beaucoup dessiné et a même fait des BD. Le visuel a donc toujours été essentiel à ses yeux. Pour Le Bonheur des uns..., le metteur en scène avait une référence en tête : le peintre impressionniste Gustave Caillebotte. Il précise : "C’est sur cette indication que les équipes ont travaillé. Je voulais qu’il y ait par exemple des touches de couleur vive à l’écran par moments... J’ai fait appel à de grands techniciens au CV prodigieux comme François Emmanuelli aux décors ou Virginie Montel aux costumes et un magnifique chef opérateur Stéphan Massis. Leur collaboration a été précieuse car leurs idées, leurs avis vous donnent des clés pour réaliser votre film."
Le Bonheur des uns... marque les retrouvailles entre François Damiens et Florence Foresti, qui s’étaient déjà donné la réplique dans Dikkenek.
Daniel Cohen est ami avec Vincent Cassel. Régulièrement, l'acteur lit ce que le cinéaste et scénariste écrit et les deux hommes ont déjà failli travailler ensemble. "Là, je lui ai fait passer le scénario en lui disant que c’était un film choral et qu’il n’y avait rien pour lui puisqu’il a plutôt l’habitude de porter ses films sur son seul nom. Mais Vincent est quelqu’un de très surprenant ! Plusieurs mois ont passé et lors d’un dîner, c’est lui qui m’a reparlé du "Bonheur des uns..." pour me dire que ça lui avait plu et qu’il voulait jouer dedans... Nous étions alors en plein casting avec déjà des listes de comédiennes et de comédiens potentiels. J’ai donc très vite appelé mon producteur qui était évidemment ravi et en une semaine, Florence et François ont eux aussi dit oui. Bérénice est arrivée un peu plus tard... Alors pour tout vous dire, il a fallu attendre un an pour que le quatuor soit libre aux mêmes dates, chacun ayant des plannings assez fous", explique Daniel Cohen.
Le Bonheur des uns... navigue entre plusieurs tons. Ainsi, le film s'apparente à une comédie ou un vaudeville mais devient de plus en plus cruel... Daniel Cohen a ainsi cherché à respecter le principe de la comédie mais en la teintant de choses plus graves, comme ce principe de la "zone d’aveuglement" dont parle le personnage de Florence Foresti. Le réalisateur raconte :
"Durant le tournage, nous avons exploité le fait que Karine et Marc (joué par Vincent Cassel), se heurtent en fait à leurs propres limites : ils essaient de dépasser ce qu’ils sont mais ils n’y parviennent pas. Face au succès littéraire de Léa, elle comme lui voudraient ne pas avoir peur, ne pas être jaloux mais c’est trop difficile. Karine par exemple est de bonne foi quand elle dit ne pas comprendre ce qui touche tant les lecteurs du roman de son amie... C’est fascinant car ça ramène à la notion d’objectivité : que percevons-nous vraiment des autres et de ce qui peut nous arriver? Jusqu’où sommes-nous aveuglés par nos frustrations ou nos manques ?"