Sixième film de Joseph Mankiewicz « Chaine Conjugale », adaptation du roman « A Letter to Five Wives » de Joseph Klempner, s’ouvre sur la présentation de deux femmes par une de leur amie, elles embarquent toutes trois pour une croisière mais juste avant de monter, elles reçoivent une lettre d’une amie commune qui leur annonce qu’elle quitte la ville pour toujours avec le mari d’une d’entre elle...
Partant de ce point-là, Mankiewicz prend le temps de présenter les trois femmes, leurs maris et leurs situations, grâce notamment à d’ingénieux flash-back, il distille plusieurs pistes et maintient le suspense de bout en bout. Il profite d’une excellente qualité d’écritures, que ce soit au niveau des personnages, intéressants, attachants et bien développés, du déroulement de l’histoire ainsi qu’aux dialogues, oscillant, à l’image du film entre légèreté, humour, élégance et sonnant toujours juste. Il arrive à nous faire ressentir les mêmes sentiments que les personnages, entre doute, espérance ou croyance.
D’ailleurs, Mankiewicz ne se gêne pas pour glisser une critique envers la société américaine, le mariage et les rapports homme/femme et c’est d’ailleurs lui, qui en parle le mieux : « Quand j’ai commencé à écrire « Chaînes conjugales », qui était une critique de la société dans laquelle j’ai vécu moi-même jadis, et que j’appelais « mon film sur les mœurs et la morale d’une époque », je pensais bien décrire avec ironie, amertume et de façon satirique ces jeunes couples mariés. »
Côtés interprétations, c’est là aussi l’une des forces du film, aucunes des stars ne se marchent dessus et sont tous excellents, que ce soit Kirk Douglas en enseignant marié à Ann Sothern qui travaille dans les milieux radiophoniques, Jeanne Crain, la plus timide et réservé des trois amies ou encore la superbe Linda Darnell dans le rôle de Laura. Ils sont superbement dirigés.
Ce fut aussi le film de la consécration pour Mankiewicz qui reçut justement les oscars du meilleur réalisateur et du meilleur scénario adapté lors de la cérémonie de 1950. Très bien mis en scène, superbement écrit, joué et dirigé c’est l’une de ses réalisations les plus aboutis que nous livre Mankiewicz.