Éloignez les oreilles innocentes (ne regardez pas ce film avec vos grands-parents ou jeunes enfants) car Dolemite Is My Name ne compte pas censurer l'homme à qui il rend hommage : Rudy Ray Moore qui, pour obtenir son quart d'heure de gloire, a tout misé sur la vulgarité extrême de son personnage Dolemite, et le buzz dans la communauté Noire en a fait une super-star. Sa popularité le poussera à se décliner dans le domaine de la musique et du septième art, créant l'un des premiers grands films de blackploitation de l'Histoire du cinéma, rien que ça. C'est cet étonnant homme qu'Eddie Murphy (truculent) nous fait découvrir de A à Z, déstabilisant quand on fait face aux premières phrases de Dolemite (le nombre de grossièreté est surprenant... Scorcese approves.) puis attachant quand on voit le bonhomme derrière le personnage, plus réservé et seulement désireux de ne pas finir à la rue. On meurt littéralement de rire devant la conception de son film, fait de ninjas Noires en minijupes, balles tirées dans tous les sens, de voitures qui explosent, de tripes tirées à la main, de scène de sexe "légèrement" exagérée (ce qu'on a ri)... Du cinéma de série B comme on les aime aujourd'hui, mais qui en 1975 ne s'adresse qu'à son public-cible : adulé par les "Frères et Sœurs" (Noirs) qui rient à en pleurer, boudé par les Blancs qui se pincent le nez devant tant de médiocrité technique (les critiques l'ont flingué plus vite que dans le film lui-même). De notre côté, on a maintenant bien envie de voir ce petit bijou de la blackploitation, on fonce le chercher dès les images d'archives finales qui nous en montrent quelques bribes (et font le parallèle avec la version "en cours de tournage" que l'on vient de voir, très ressemblante). On sent tout l'amour pour ce cinéma bis, fauché, basé sur l'humour de son public, et on plaint le personnage du réalisateur blasé d'assister à ce désastre joyeux tandis que Dolemite est convaincu du caractère formidable de ce qu'il tourne... Son enthousiasme nous gagne, et l'on peut facilement se rincer l’œil sur les plans qui nous montrent des affiches des films cultes du genre (Blacula, par exemple) dans les bureaux des producteurs (on prend un calepin et on note les titres), ou ont la patience de nous montrer les trucages des films (comment sont réalisées les explosions ou les tirs de balles...), un vrai chant d'amour au cinéma en général, en plus de celui qui défend bec et ongles la série B. La vulgarité extrême est son originalité, mais Dolemite n'en est pas moins un personnage attachant, et son film-hommage porté avec envie par Eddie Murphy nous donne une furieuse soif de films de blackploitation.