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2,0
Publiée le 5 novembre 2024
Le seul problème véritable c'est que l'Europe est solidaire, dans son style et dans sa propension aux massacres, ce qui est sans doute une seule et même chose. Et malines sont les visions qui ressemblent à des éclats de verre car le langage de l'enfant, privé de miroir, demeurera pour nous le langage de l'enfant. Il est le premier fragment d'une vision du monde qui se rêve époustouflante. Et quelle puissance dans le récit et quel sens à nouveau de l'abstraction. Delaunay avez-vous dit ? Oui c'est d'avant-garde dont il est ici question puisqu'il n'y avait sans doute pas meilleure manière pour ouvrir le siècle que de se souvenir que les nations ne savent plus se regarder. Haneke démontre avec ingénuité que la grande figure abstraite du XXème siècle c'est l'Europe, cette demoiselle inapte à se reconnaître et à se mirer à travers une altérité. Sans doute le film le plus politique de l'année 2000. Voilà ce qu'on dirait, sans doute, si nous étions aveugles. Car ce cortège de compliments, le film l'implore. Il parvient pourtant à étonner lors des premières séquences lorsque nous sommes encore vierges de ses ressorts : le point de rupture entre le plan séquence initial et les photos de Luc Delahaye en Yougoslavie entend accueillir un fantôme qui nous viendrait de l'imaginaire godardien. Mais posture que tout cela : la liberté formelle que s'octroie Haneke est le ferment d'un système narratif bien trop sûr de ses droits. Je dynamiterai tout ce qui s'apprête à vivre. Voilà ce que rabâche inlassablement chaque cut au noir. C'est le mot d'ordre des Etats européens en Yougoslavie et la mécanique esthétique installée par le cinéaste reproduit cette perspective autoritaire. Oui il y a de la puissance chez Haneke mais c'est une puissance solitaire car elle ne nous est jamais rendue, pas plus au dévouement admirable des comédiens qu'à nous, spectateurs de destins irréparables. Les images ont du pouvoir sur les autres mais elles ne sont pas à égalité, ni entre elles ni par rapport à nous et il n'est pas plus permis au fragment de vivre sa vie de fragment, qu'au secret de se contempler comme secret. Cette vieille idée que la signification doit être enterrée, comment la croire lorsque Haneke s'arroge tous les pouvoirs ? De quel inconnu parlons-nous ici ? Ce secret confié à l'enfant n'a plus rien à voir avec ce que se chuchotent l'ombre et la lumière dans les meilleurs films de Fritz Lang ou avec ce que le vent dérobe au silence qui sépare Elena Kouzima et le soldat allemand dans le Okraina de Barnet. Ici tout est falsifié car ce prétendu "code inconnu" n'est que la façade d'une aspiration à dominer et à asservir. Le film peut fasciner mais quelle faiblesse représente alors cette fascination. Haneke ne devrait pas pouvoir être seul prophète en son pays. " Récit incomplet de divers voyages" nous dit-on mais la mendiante n'a jamais voyagé, pas plus que la fiction n'a essayé de naviguer en terres documentaires. Et il n'a d'ailleurs rarement été aussi impossible de voyager qu'à travers ce temps vaincu pourtant possédé par la passion de vaincre. Le moralisme cérébral d'Haneke a-t-il seulement daigné interroger la pitié du cadre à l'égard du cadré ? Puisque après tout c'est de cadres de vie dont il est ici question : un adolescent fugue sa ferme natale pour trouver sa voie, une réfugiée roumaine cherche sa place sur la terre, un reporter de guerre peine à trouver une image du bonheur. Mais ce n'est pas ce qui intéresse le cadre et l'écrasante somme de prouesses techniques qu'exhibe la caméra d'Haneke se trouve tout à fait étrangère à quelque existence que ce soit. Quelle est la valeur d'un plan-séquence lorsqu'il ne sait que se regarder lui-même avant de songer qu'il est l'organe d'une détresse ? Nous ne demandons pas des victimes, bien au contraire. C'est d'équité dont il s'agit. Et de justesse. Haneke fait semblant de se démarquer car son style est soumis aux puissances uniformes qui fleurissent aux quatre coins de l'Europe et qui ne se posent qu'une seule et même question : moi, moi, moi. La publicité aussi n'a qu'un objet mais elle, au moins, n'attend guère qu'on la félicite car elle se sait méprisée des esthètes.
Existe-il seulement encore des objections ? Il semblerait que le temps retrouvé n'est jamais voulu du temps perdu : il nous est passé sous le nez, pressé de filer vers sa conclusion aporétique et lâchement sybilline. Code inconnu est un film qui entend innover sans jamais prendre en compte qu'innover peut vouloir dire quelque chose. La misère n'a jamais eu le sentiment de sa misère et les catastrophes sont des appuis dont se sert Haneke pour nous transmettre son austérité. Une image de marque et rien de plus. Mais nous devons reconnaître néanmoins qu'au regard de son jumeau* et de la décennie 2010 du cinéaste ce médiocre pensum demeure un film presque remarquable.
Le choix artistique dont fait souvent preuve Michael Haneke dans la mise en scène de ses films peut rebuter. Pour son cinquième long-métrage, sorti en 2000, c’est clairement rédhibitoire. Sa dénonciation des travers de notre société, en l’occurrence la difficulté de communication, se retrouve clairement contrecarrée par la limite de son style, à savoir clinique et austère. L’enchainement de saynètes découpées à la hache ne procure aucune émotion. A force de regarder son nombril, le réalisateur autrichien en oublie le spectateur. Du coup, son propos devient inintéressant et ne touche jamais sa cible. Bref, une œuvre insipide et ennuyeuse.
Avec "Code inconnu : Récit incomplet de divers voyages", Michael Haneke explore les problèmes de communication à travers les portraits d'individus confrontés aux barrières linguistiques et aux codes sociaux. Ce film mosaïque, qui tisse plusieurs intrigues, est effectivement incomplet et donne l'impression d'un brouillon aux allures triviales. Il faut accepter une narration qui se termine brusquement en pleine action ou au milieu d'une phrase. À notre avis, cela le rend pénible et particulièrement alambiqué.
Premier film de Michael Haneke réalisé en France, Code inconnu (2000) a été tourné entre les sulfureux Funny game et La pianiste. Il paraît beaucoup moins polémique que ces deux-là, même s’il aborde de front certaines thématiques compliquées, que l’on retrouvera notamment dans son remarquable Caché (le rapport complexe à l’immigration, le racisme, la relation aux images, à la réalité et à la fiction…). Reprenant son dispositif de 71 fragments d’une chronologie du hasard, le film est une succession de plan-séquences, parfois coupés au beau milieu d’une conversation, dans lesquels on retrouve différents personnages au fil de l’intrigue, un peu à la manière d’un puzzle. Un bel exercice de style, qui préfigurait certaines obsessions des sociétés occidentales dans les années suivantes.
On constate vite que le récit est un peu vain, dans le sens où il n'y a pas d'intrigues, pas de réelles évolutions des choses ou des personnages et très vite l'ennui s'installe. Le pire reste sans doute un montage à la serpe qui accentue la sensation de sketchs et qui souligne le fait qu'aucun segment ne semble lier à l'autre. Comme tout film à segments un décalage s'ouvre entre les parties réussies et les autres, les séquences qui amènent à un minimum d'émotions et celles qui laissent un sentiment de néant. Dans les meilleures scènes on peut citer le jeune homme qui tente d'expliquer l'humiliation gratuite d'une SDF par un ado, la fillette devant sa classe qui s'avère être composée de sourd-muets ou la passagère du métro qui se fait cracher dessus. A contrario certains passages sont grotesques voir invraisemblables comme l'intervention des policiers qui tient du fantasme ou de la caricature, ou des passages un peu trop redondants comme le tournage. En conclusion Haneke signe un film qui n'a pas grand chose à dire, l'ironie du sort pour un film sur le manque de communication. La première déception pour un Haneke. Site : Selenie.fr
Une suite de plan-séquences racontant autour d’un incident commun avec une mendiante, criant de justesse, les parcours des différents protagonistes. Beaucoup de scènes parfaitement réussies : le repas père taiseux/fils ingrat (?), le repassage troublé, le dragueur-racaille du métro… mais quelques autres sont plus confuses, en Roumanie par exemple. Un film sur la nature humaine, avec ses faiblesses et ses coups d’éclat, ses moments de vie et de déprime. La fin ambigüe est à l’image du reste.
Voici un film qui ressuscite un temple du cinéma des années 90: le kinopanorama à La Motte-Picquet, Paris 15ème!!!! Dans cette longue et dernière partie sans paroles, censée donner le code final de ce film choral totalement vide et abscons. Une sorte de Babel triste, gris et déprimant. Les gens ne se rencontreront pas. Le code n’est pas celui qui va les réunir car il ne se partage pas.
Autant le début est exceptionnel, autant le reste beaucoup moins.
Il est difficile d’avoir un avis sur Code inconnu tant il agit comme une accumulation de dizaines de scènes indépendantes, presque un film à sketches. On est loin du récit chorale dont il a l’air. Et donc on peut très bien accrocher à certaines séquences comme beaucoup moins à d’autres. Ainsi il est difficile à juger dans sa globalité.
Les premiers instants sont excellents donc puis progressivement tout se perd. L’absence de sous-titres aux langues étrangères n’aide pas. Ça tourne en rond. On constate une idée et un dispositif intéressants mais pas de quoi captiver durant deux heures.
Nouvelle tentative pour moi avec le cinéma d’Haneke et c’est une nouvelle déception. Je dirais même un échec dans ce cas précis. Code inconnu veut parler de la difficulté de communication entre des personnages repliés sur eux et leurs propres aspirations et du coup de l’incompréhension et du conflit que cela engendre. Problème il parle tout seul, il fait son exposé de manière didactique sans jamais inviter le spectateur à le rejoindre. Non seulement c’est barbant mais cela fini par être repoussant.
Haneke pose un regard cynique sur les déviances et l’indifférence d’une société individualiste, terni par un récit trop décousu de plusieurs destins qui s’entrecroisent, hormis quelques scènes percutantes.
Code Inconnu est le seul film de Haneke que je n'avais pas encore vu et c'est de loin pas le plus connu de sa filmographie. Néanmoins c'est loin d'être un mauvais film, au contraire, on y retrouve bon nombre de qualités qu'on appréciait dans ses autres œuvres.
Le film est composé uniquement de séquences, assez déconnectées les unes des autres, suivants différents personnages qui ont comme seule particularité apparente de s'être croisés au début du film. Et chacune de ses séquences se termine systématiquement en eau de boudin. Il me semble que dans Le Château adapté de Kafka Haneke utilisait le même principe. Le film coupe à un moment inattendu, alors que rien n'est résolu. D'ailleurs le film coupe lui-même alors que rien n'est résolu et je ne suis même pas sûr de savoir quel était réellement le problème de départ.
Le processus est certes frustrant, mais vraiment marquant. Entendre ce photographe présenter son travail, sa vie dans des pays en guerre pour faire ces clichés, se faire couper brusquement par un écran noir, c'est pas commun. (j'ai pris cette séquence là, mais c'est pareil pour toutes) J'aime bien cette idée parce que ça donne l'impression qu'il n'y a pas de bon moment pour couper, que chaque coupe, chaque ellipse est forcément artificielle. Tout comme chaque séquence qu'il choisit de nous montrer peut également sembler être issue d'un choix artificiel. Pourquoi nous montre-t-il Binoche se faire agresser dans le métro (scène glaçante au possible) ? Pourquoi nous la montre-t-il repasser son linge ?
En plus pas mal de ces séquences sont filmées en plan séquence, où on va donc suivre les personnages en temps réel sans trop savoir ce qu'il faut voir, sans trop savoir quelle information il faut retirer de chaque segment. Il y a un petit côté puzzle à recomposer ou bien code (inconnu) à déchiffrer.
C'est l'une des qualités du cinéma de Haneke, il n'y a pas de solution explicite, clé en main.
En tous cas le film est un peu l'inverse (si je me souviens bien) de 71 fragments d'une chronologie du hasard où le film se terminait par la réunion de tous les personnages, ici le film s'ouvre sur cette réunion, à savoir une altercation entre deux jeunes hommes dans la rue. Rien que cette scène donne plein de pistes de réflexion, notamment autour du racisme (la plus évidente), mais surtout on voit un jeune homme qui pense faire le bien et qui va finalement causer "la perte" de la femme qu'il tentait de protéger. Une bonne action n'est pas toujours récompensée. Je trouve que c'est très typique du cinéma de Haneke, il n'y a pas de justice, pas de sacro-saint scénario qui viendrait réparer les erreurs et punir les méchants... et surtout en parlant de méchants, ce n'est absolument pas manichéens.
Et si le film a beau être vraiment dur à regarder, on a par exemple une séquence horrible dans une étable avec un petit clin d’œil à Benny's video, je trouve que ça fait un bien fou de voir un film qui ne prend pas son spectateur par la main, qui le laisse réfléchir à ce qu'il a vu tout en osant le secouer.
Donc si Code inconnu n'est sans doute pas le meilleur film de son auteur (pour moi ça serait plus Caché ou le Ruban Blanc), ça reste un film à voir, surtout si on aime le côté glaçant du réalisateur autrichien.
La première scène de "Code inconnu", filmée en lent traveling dans une rue parisienne très achalandée réunit la quasi-totalité des protagonistes d'un récit fragmenté. On y fait la connaissance d'Ana (Juliette Binoche), une actrice dont Georges, le compagnon, est photographe de guerre. Jean, le frère cadet de Georges, qui a quitté sur un coup de tête la ferme dont un père autoritaire voudrait lui faire reprendre les rênes, frappe à la porte d'Ana et lui demande l'hospitalité. En se promenant dans la rue, Jean jette un détritus à une mendiante roumaine, Maria, venue en France à la recherche d'une vie meilleure. La désinvolture de ce geste grossier scandalise Amadou, qui est éducateur dans un institut de sourds-muets. Le ton monte. Les esprits s'échauffent. La police doit intervenir.
Michael Haneke est sans conteste l'un des plus grands réalisateurs contemporains. Il a reçu deux Palmes d'or, en 2009 pour "Le Ruban blanc" et en 2012 pour "Amour", des œuvres froides, violentes, traumatisantes. Lorsqu'il sort Code inconnu en 2000, Michael Haneke n'est plus tout à fait un inconnu - la tension asphyxiante de son précédent film, "Funny Games", sélectionné à Cannes en 1997, avait déjà marqué les esprits - mais il n'est pas encore le maestro qu'il deviendra dix ans plus tard.
Pour la première fois, Michael Haneke, produit par son ami Marin Karmitz, tourne en France - il y reviendra souvent avec "Caché", "Amour" et "Happy End" - avec des acteurs français pour la plupart (parmi lesquels on reconnaît certains jeunes talents tels Florence Loiret-Caille ou Aïssa Maïga). Il retrouve la même structure que celle de 71 fragments d'une chronologie du hasard sorti cinq ans plus tôt. Il s'agit de juxtaposer, un peu comme Georges Perec dans "La Vie, mode d'emploi", des vignettes sans lien évident entre elles. Ces saynètes s'interrompent parfois brutalement, avant leur fin logique, nous rappelant que, dans la vie réelle, à la différence du cinéma "totalitaire", la réalité d'une situation est souvent tronquée.
"Code inconnu" peut rebuter. Son sujet peut sembler insaisissable. On peut lui reprocher ses parti-pris formels trop intellectualisants. Emblématique de l'œuvre de Haneke et annonciateur de ses plus grands films, "Code inconnu" n'en laisse pas moins une marque durable.