Un jour ça ira marque la seconde collaboration Stan et Edouard Zambeaux. Ils se rappellent comment est né le film : "J’étais à l’étranger, je suis revenu, on bossait sur les mêmes thématiques, mais avec des outils différents. On s’est dit : allons pour un film ! Et puis, allons pour un deuxième film ! Cela nous semblait naturel", confie le premier. Le second poursuit : "C’était une sorte de logique, d’évidence. Un jour ça ira c’est un sujet que j’ai approché d’abord en tant que journaliste et tout à coup, en creusant, il était évident que cette histoire était trop grande pour se contenter du journalisme. Alors on en a parlé et décidé de faire ce film ensemble tandis qu’on achevait le précédent. C’était donc une évidence de repartir ensemble sur cette aventure, et puis Stan maîtrise l’outil, pas moi."
A l’origine de Un jour ça ira, il y avait l’envie pour Stan et Edouard Zambeaux de faire quelque chose de beau pour décrire une réalité souvent présentée sous son aspect uniquement miséreux. Les deux cinéastes voulaient magnifier leurs personnages et montrer que la situation extrêmement difficile dans laquelle ils sont n’atteint pas leur dignité, le tout dans une approche esthétique. Ils expliquent :
"Il y avait cette volonté-là et c’est en cela qu’on est à mes yeux au delà du journalisme. Çela parle d’un regard sur la société, de l’ampleur d’un phénomène. Et puis le traitement se veut beaucoup moins descriptif qu’une approche journalistique. Je n’aime pas du tout l’injonction du positif et il n’était pas question d’y céder. Nous n’avons pas modifié la réalité, mais il y a de la poésie chez ces enfants même quand ils sont au 115. Nous voulions juste avoir un regard bienveillant, optimiste, nous laisser surprendre et nous laisser porter par l’énergie spontanée qui émanait de ce lieu."
L’Archipel, ce centre d'hébergement d'urgence au cœur de Paris, a également marqué Stan et Edouard Zambeaux de par son côté très cinématographique, très vaste et en même temps fermé comme une bulle. Le premier précise : "Tu ne fais pas un film sur le lieu, tu ne fais pas un film sur les gens, tu fais un film avec le lieu, tu fais un film avec les gens qui y sont. Et l’on a vécu avec les gens tout ce temps-là ; c’était le prix pour pouvoir obtenir leur confiance et leurs paroles. Le premier enjeu était de construire le projet avec eux pour qu’ils sentent que l’on pourrait réellement raconter quelque chose ensemble. Ça passait d’abord par les parents qui ont accepté de nous confier leurs enfants, pour qu’on avance avec eux et sous leurs regards bienveillants. Quand ils nous regardaient de loin, ils comprenaient très bien ce qui était en train de se mettre en place."
A l'origine, Stan et Edouard Zambeaux voulaient se centrer sur les mamans, puis sur les familles, pour finalement faire un film sur les enfants. Le second justicie ce choix : "Parce qu’au fur et à mesure que le film avançait, on a réussi à identifier ou à mettre sur pied les moyens de construire une narration qui évidemment s’appuyait sur les personnages, mais qui avait une constance supérieure aux personnages. Je pense à la Zep, aux ateliers chants, pour ne pas être au fil de l’eau."
La rencontre de Stan et Edouard Zambeaux avec Djibi a été déterminante et a rendu possible ce projet guidé par les enfants. "Djibi était entre le monde des enfants et celui des adultes. Il fédérait toute la bande des enfants tout en ayant une relation privilégiée avec les adultes et les travailleurs sociaux. Il s’est vite imposé au coeur du film et comme le lien entre toute la communauté du centre. C’est devenu un proche. Et j’espère qu’avec lui et sa mère l’histoire continuera, même au delà du film. Et il y avait une autre gamine, qui s’appelle Ange, qui était un personnage secondaire. Elle avait plus de mal avec la parole, parce qu’elle était plus timide. Alors elle a trouvé son créneau : c’était la musique. Et c’est très bien comme ça", se souvient le premier.
Stan et Edouard Zambeaux ont écrit Un jour ça ira ensemble. Le premier était très présent durant la préparation, le repérage, pour permettre de faire voyager l’outil dans le lieu, comme il le précise : "Réaliser des petites choses périphériques pour que les jeunes et les moins jeunes, puissent s’approprier la caméra, qu’elle devienne un personnage de leur quotidien. Après, pour le tournage, j’y étais souvent, Édouard passait quand il le pouvait et on essayait de s’organiser au jour le jour". Le second poursuit : "Il y avait un énorme boulot sur le terrain que Stan a beaucoup pris en charge. Ensuite, il y a eu toute la phase d’écriture et de réécriture. Essayer d’inventer, de découvrir, au fur et à mesure, quels pourraient être les outils narratifs : car il fallait bien trouver les fils rouges. On passait deux semaines avec une famille et tout à coup ils étaient relogés et bien sûr on se réjouissait pour eux, même si ça voulait dire que nous perdions nos personnages. On se retrouvait dans une unité de lieu avec des gens presque captifs (dans le sens huis clos) qui, en deux heures de temps, pouvaient partir. Il fallait réinventer en permanence le vecteur narratif."