Les Destinées d'Asher : les secrets du tournage

Les Destinées d'Asher est en partie basé sur l'expérience personnelle qu'a eue Matan Yair lorsqu'il était enseignant. Pendant neuf ans, il a ainsi enseigné la littérature au lycée, le plus souvent dans le cadre de cours de soutien ou à des élèves en probation. Le metteur en scène explique : "Ces jeunes sont quasiment tous issus de la classe ouvrière. J’ai eu des élèves violents, charmeurs, brutaux, recouverts de cicatrices et dotés d’un certain instinct de survie. Pendant des années, je me suis efforcé de croire que les cours pourraient inciter les élèves à lire, à aimer la littérature et à en découvrir toute la beauté. J’étais cependant hanté par l’issue la plus probable, à savoir que la fin du lycée marquerait également la fin de leur côtoiement de la littérature. Ce serait la seule période de leur vie durant laquelle ils liraient des poèmes, des nouvelles, des pièces de théâtre et des romans."

Matan Yair s'est alors interrogé sur l'objectif de ces cours et a éprouvé le besoin d’écrire quelque chose pour croire à nouveau que son travail avait un sens, que des liens importants pouvaient se forger en salle de classe et que les textes étudiés pouvaient avoir un impact durable. Il se rappelle : "C’est ainsi que j’ai commencé à mentalement tracer les contours d’une histoire. Durant cette même période, j’ai rencontré un nouvel étudiant, Asher. Il m’intriguait et j’ai immédiatement pressenti qu’il serait un personnage fascinant car il suscitait en moi des réactions émotionnelles à la fois fortes et contrastées. J’ai ressenti de la peur face à sa brutalité et à son absence de limites, de la compassion du fait de ses difficultés de lecture, de la jalousie en raison de sa capacité débridée à suivre ses impulsions et ses désirs."

Les Destinées d'Asher se déroule essentiellement à Herzliya, une petite ville au nord de Tel Aviv où Matan Yair a grandi et habité jusqu’à l’âge de 27 ans. C’est également là qu'il travaille en tant que professeur de littérature et d’histoire, et tous les jeunes qui jouent dans le film, ses anciens élèves, sont également originaires de cette ville. Il précise :

"Afin d’assurer une certaine authenticité et d’aider Asher, je tenais à ce qu’il joue dans son contexte naturel. Les scènes qui se déroulent chez lui sont réellement tournées dans sa maison familiale, les scènes à l’école ont lieu dans notre véritable école, les sites d’échafaudages sont d’authentique sites où il a travaillé. Herzliya n’a pas la dimension urbaine de Tel Aviv. Sa population est très diversifiée, issue de différents contextes culturels et les situations socio-économiques sont également très diverses."

Concernant Asher, Matan Yair savait depuis le début qu'il voulait que le comédien Asher Lax joue lui-même son propre rôle. Durant les auditions, le réalisateur a examiné quelques autres options pour le rôle et savait qu’il était risqué de baser le film sur le jeu d’un acteur non professionnel (Asher apparaît dans toutes les scènes du film). Mais il en est arrivé à la conclusion suivante : personne d'autre que Lax ne pouvait incarner ce personnage de la même façon. Il développe :

"J’ai toutefois senti que je serais à même de le guider vers la posture émotionnelle adéquate. J’étais persuadé qu’il n’aurait aucun problème à exprimer les facettes explosives et colériques, mais je soupçonnais qu’il aurait plus de mal pour les moments plus doux et nuancés. J’étais curieux de voir si Asher allait être capable d’intégrer au rôle d’autres aspects de sa personnalité. J’avais également en tête une personne bien réelle pour le rôle du père, un homme du nom de Milo qui avait déménagé mes meubles lorsque j’ai changé d’appartement. Milo avait une histoire spéciale et une façon unique de parler et de bouger. Je voulais qu’il ait ce rôle, mais j’ai fini par comprendre qu’il serait risqué de travailler avec deux acteurs non professionnels."