J'ai pensé dans les premiers temps à "Cleo de 5 à 7". Mais à 60 ans de distance, l'héroïne de Varda m'a semblé avoir bien plus de consistance, dans sa déambulation Parisienne, que cette jeune femme, tout de même plus très jeune d'ailleurs, se cherchant, en vacances d'elle même, de projets qu'elle semble refuser d'élaborer. Rien ne semble encore presser. Intermittente du spectacle et de la vie, comme tous les gens qu'elle rencontre.
Mais il est vrai que les années d'adolescence n'en finissent pas de se rallonger, depuis les années 60. Néanmoins, arrive un moment, où l'on ne peut plus reculer certains choix, comme celui de la maternité, même avec avec l'appui de la congélation des ovocytes. Le film aborde ingénieusement ces limites d'une liberté proclamée, ayant décalé certains choix qu'on n'avait pas à affronter dans le passé, la nature et la passion imposant leurs lois.
C'est un Madrid très photogénique, pas encore atteinte des miasmes du covid, où l'on retrouve les derniers soubresauts de la movida, carrefour à la fois du monde, et d'un pays fait de traditions et d'histoire. C'est un film agréable, en phase avec cette époque, et que le covid a d' ailleurs déjà peut être déjà refermé, comme la fin d'un monde qui n'en finissait pas de mourir.
Celle d'un indolence et d'un spleen existentiel, où le regard ne s'accroche pas trop à la précarité des autres, mais survit grâce à un réseau d'amis branchés. Même en déambulant sans but, il semble facile dans cette ville de retrouver à chaque coin de rue de vieux amis, comme si Madrid était un village. Il y a ainsi des invraisemblances de scénario et des langueurs un peu trop appuyées sur le visage et le corps de l'actrice, par le biais d'une caméra amoureuse, qui fait défiler l'écheveau des jours d'aout, comme des morceaux de musique légère.
.J'ai imaginé Eva avec un masque, dans un Madrid confiné, tant nous avons tourné la page à ces temps que l'expérience présente situe maintenant dans l'insouciance des jours heureux, comme un avant guerre improbable et inconscient de ce qui se prépare. Sous le fard et les rencontres, le même vide existentiel que Fellini parlait dans " la dolce vita", ou Dino Risi dans " le fanfaron"....Il date de moins de deux ans, c'est déjà une film du passé