Aaah les films de Noël, ces petits plaisirs coupables où un gros barbu habillé de rouge et son armée d'elfes viennent décupler la mièvrerie endormie chez les mortels pendant tout le reste de l'année...
Pour son lancement hivernal, la plateforme de streaming Disney + ne pouvait pas passer à côté de ce phénomène qui pullule sur les écrans en cette période et dont l'objectif semble être de donner des envies de meurtres à base de sucres d'orge pointus à toute âme cynique bien portante.
Cela dit, afin de sortir du lot et tenter de séduire aussi bien les adeptes que les plus réfractaires au genre, il faut bien reconnaître que Disney a mis le paquet en réunissant à l'affiche un duo de talents à la sympathie incontestable : Anna Kendrick et Bill Hader. Et, rien que pour ça, "Noelle" attire la curiosité...
Le film nous emmène dans sa propre version du village du Père Noël perdu au milieu du Pôle Nord. Le cadre y est évidemment toujours aussi féerique entre décors enneigés et maisons colorées mais, ici, ce petit coin de paradis magique est un lieu construit autour des Kringle, une dynastie familiale qui se passe le flambeau du métier de Père Noël de père en fils depuis 2000 ans. Aujourd'hui, le dernier Père Noël en date est mort (oui, le gros bonhomme barbu tel que représenté dans notre imaginaire a passé l'arme à gauche, désolé les enfants !) et c'est à son fils qu'incombe de reprendre les rênes de la profession. Problème, ce dernier n'a absolument pas la fibre de gros barbu distributeur de cadeaux et, à quelques jours de sa première grande virée nocturne en traîneau, il prend la poudre d'escampette. Se sentant responsable de sa fuite, sa sœur Noelle part à sa recherche dans notre monde...
Comme d'habitude, deux questions primordiales viennent en tête pour juger la qualité d'un film de Noël :
• Est-ce que le film a les capacités de rejoindre la liste des incontournables que l'on se repasse à chaque fin d'année ?
• Est-ce que celui-ci fait au moins le job pour nous rassasier d'humour et de bons sentiments le temps de son visionnage ?
Bon, la réponse à la première interrogation est clairement non. Le long-métrage de Marc Lawrence, spécialiste de comédies romantiques avec Hugh Grant, est un film de Noël gobalement anecdotique à tous les niveaux et n'a pas beaucoup d'arguments solides pour s'inscrire parmi les grands classiques du genre. En plus, bon nombre de ses thématiques inhérentes à notre époque et pas vraiment amenées avec la plus grande subtilité lui confèrent de fait une durée de vie forcément éphémère avec le poids des années.
Ceci étant vite résolu, reste à savoir si, en tant que tel, "Noelle" fait au moins le minimum syndical afin de réveiller notre instinct de grosse guimauve de Noël prête à fondre au coin d'un bon feu. C'est un "mouais" pas très enthousiaste qui nous vient immédiatement à l'esprit tant cette espèce de mix entre "Elfe" (en moins drôle) et "Il Était Une Fois" (en moins enchanteur) semble en faire à la fois trop et pas assez.
En effet, "Noelle" brasse un nombre assez conséquent de sous-intrigues paraissant, au final, toutes plus ou moins survolées. À l'exception du destin de Noelle qui, vous l'aurez sans doute déjà deviné, va bousculer le vieux système patriarcal de sa famille pour se révéler être la vraie prétendante à la succession du Père Noël, tout ce que le film développe manque cruellement de consistance ou ne va jamais au bout des choses.
La rencontre vaguement sentimental entre Noelle et un père divorcé (Kingsley Ben-Adir), sa relation avec sa gouvernante/"elfe gardien" (Shirley MacLaine), le cousin geek (Billy Eichner) qui veut dénaturer la distribution de cadeaux annuelle en la transformant en une plateforme de livraison mondiale type Amazon, le frère en fuite (Bill Hader), les petites interactions de l'héroïne avec des personnages secondaires chargés de lui faire réaliser sa vocation... "Noelle" a bien des pistes amusantes ou touchantes mais il s'éparpille sans cesse devant leur nombre et ne fait finalement mouche sur aucune d'entre elles. En fait, on a rapidement l'impression d'être devant un long-métrage un brin fainéant qui, devant son statut de simple "film de Noël", s'est contenté d'accumuler des bribes d'idées en pensant que leur pluralité illusoire suffirait à créer la magie tant attendue.
Ce sentiment de facilité va d'ailleurs jusqu'à déborder sur l'aspect visuel de l'entreprise. Le simple fait d'avoir choisi Marc Lawrence, metteur en scène n'ayant jamais brillé par de très grandes prises de risques derrière la caméra, en est le parfait symptôme. Mais, même quand le bonhomme va faire des efforts pour essayer de réveiller notre regard d'enfant en convoquant toute l'imagerie de Noël, un élément inachevé et parasite va venir gâcher la fête. Snowcone, le pauvre petit bébé renne en CGI épouvantables, peut en témoigner tant il pique les yeux à chacune de ses apparitions.
Heureusement, le film possède au moins un grand rayon de soleil capable de faire fondre le cœur le plus glacé au monde : Anna Kendrick. Amenant toute la candeur et la bienveillance nécessaire à son personnage, elle est véritablement Noelle, celle qui croie et arrive à insuffler l'esprit de Noël à un film loin d'être à sa hauteur. L'énergie irrésistible et permanente qu'apporte la comédienne parvient même à nous donner un début de sourire devant les gags ou les situations les plus attendus du film (environ 90% de son contenu).
Bref, elle est vraiment ce petit supplément d'âme indispensable à la manifestation de notre relative indulgence mièvre devant cette sucrerie de Noël plus qu'oubliable. Merci à elle.