Saint-Georges est le résultat de deux années de recherches sur l’une des périodes les plus sombres de l’histoire récente du Portugal, où le pays a vécu une profonde crise économique. Le scénariste et metteur en scène Marco Martins explique : "Les salaires étaient bloqués, les gens mis à pied. Beaucoup de familles se sont retrouvées à la rue. Le niveau d’endettement a atteint des sommets inédits et les gens se sont retrouvés incapables de rembourser leurs dettes. Le fi lm vient de l’urgence de ne pas oublier une période où les conditions socio-économiques des Portugais s’abaissaient de jour en jour."
"Jorge est clairement une victime de la crise. Autour de lui, tout s’effondre. Il a perdu son boulot, et maintenant sa famille. Il essaye de se battre contre la fatalité, mais les cartes sont contre lui. C’est un homme plutôt naïf et qui n’est pas préparé à ce qui se passe autour de lui. En arrivant dans la société de recouvrement, il voit beaucoup de personnes dans les mêmes conditions que lui. L’ironie du personnage veut qu’il décide de payer ses propres dettes grâce à l’argent qu’il gagnerait sur les dettes des autres, en utilisant la force physique. Mais son principal dilemme est moral, c’est un boxeur, mais il n’est pas violent. Nous pensions que ce serait beau qu’il ait un saint patron et en écoutant la prière à Saint Georges, nous avons également trouvé le titre."
Nuno Lopes, qui joue Jorge, avait un jour dit à Marco Martins qu'il aimerait faire un film de boxe. Une dénommée Mariana Fonseca, qui aidait le réalisateur dans ses recherches lorsqu'il se documentait pour le film, a alors commencé à visiter des gymnases et à interviewer des boxeurs. "La crise économique est devenue un personnage du film lorsque nous avons compris que la plupart travaillaient comme garde de nuit, la boxe au Portugal étant surtout d’un niveau amateur, ne payant que de façon très occasionnelle. Avec la crise, ils ont commencé à travailler également pour les sociétés de recouvrement aux méthodes pas trop légales", nous renseigne Martins.
Certains polars de Jules Dassin et le film sur la boxe Sang et or (Robert Rossen) ont donné envie à Marco Martins de réaliser un long métrage centré sur ce sport, mélangeant approche documentaire et fictionnelle.
Marco Martins a voulu tourner aussi bien avec de vrais acteurs que de "vrais gens". Il a donc créé un espace où les comédiens pouvaient coexister avec des habitants locaux, des boxeurs et des personnes endettées. "Pendant plusieurs mois, on a fait des répétitions où tout le monde participait. C’était nécessaire de vraiment s’immerger dans ces univers de boxe, de société de recouvrement... Aucun dialogue n’a été écrit pour les acteurs non-professionnels. Le tournage complet a pris environ 9 semaines. C’était plus long que d’habitude car j’ai constamment essayé de croiser le documentaire avec la fiction. C’est un film qui demande une grande liberté formelle et c’est ce qui m’a amené à passer 6 mois en montage pour justement trouver ce bon équilibre entre fiction et documentaire", se rappelle le réalisateur.
A noter dans le film la présence de Jean-Pierre Martins, un musicien et acteur franco-portugais qui s'était fait connaître en 2007 en se glissant dans la peau du boxeur Marcel Cerdan dans La Môme porté par Marion Cotillard. Récemment, on a pu le voir incarner le frère de Kad Merad dans la série politique Baron Noir.
Nuno Lopes n'avait jamais fait de boxe avant de tourner dans Saint Georges. Pour être crédible dans la peau du rôle-titre, le comédien a pris 20 kilos (principalement de muscles) et s’est entraîné à ce sport pendant deux ans (dont six mois de manière particulièrement intense). Le cinéaste précise : "Il est allé dans les quartiers où nous allions tourner. Il a commencé à traîner avec les mecs qui bossaient pour les sociétés de recouvrement. Il a d’ailleurs reçu des coups et certaines de ses blessures dans le film sont réelles."
L'entraîneur de boxe du personnage de Jorge joue dans le film son propre rôle. Et le combat que l'on voit au début, même s'il a été chorégraphié, se déroule dans un contexte authentique.
Pour trouver Nelson, le fils de Jorges, Marco Martins a vu près de 4 000 enfants. Lors de la préparation du casting, le réalisateur a demandé la permission à des écoles de Lisbonne de pouvoir s'asseoir dans les salles de classes pour observer les enfants. "Le petit garçon devait aimer Nuno, s’identifier à lui et inversement. Lorsque nous sommes arrivés à trois "finalistes", j’ai entrepris un long travail avec eux. Mais c’était évident que David était le bon. Il est très intelligent et il savait exactement ce qu’on attendait de lui pour ce rôle", se rappelle Martins.